Inventaire manuscrit : MMA-132-133
Nicolas-Marie-Alexandre Vattemare est né à Paris en 1796. Il suivit des études de médecine à l’hôpital Saint-Louis de Paris, mais fut renvoyé en raison de ses talents exceptionnels de ventriloque, qui lui faisaient jouer des tours à ses professeurs. Il fera donc de ce talent un métier et pendant vingt ans, sous le nom de Monsieur Alexandre, il triompha dans toute l’Europe. Durant ses voyages, il ne manquait pas de visiter bibliothèques et musées des villes où il s’arrêtait et son attention fut attirée par le grand nombre de doubles qui s’y trouvaient. Ainsi lui vint l’idée, à laquelle il consacra toute son énergie et toute sa fortune durant la seconde partie de sa vie, d’organiser un système d’échange international de publications, d’objets d’art, de monnaies et médailles. Dans le cas du don qu’il fit au Cabinet des médailles (382 monnaies et médailles américaines), il s’agissait bien d’un don, mais non d’un échange, même si l’administrateur général de l’époque, Jules Taschereau, marqua du mépris pour sa générosité. En effet, en réponse au ministre de l’Instruction publique qui lui demandait s’il convenait d’adresser à Vattemare un « témoignage de satisfaction » pour ce don, Taschereau répondit : « Tous les journaux ont déjà retenti de ce don, qui est encore vous le voyez, Monsieur le Ministre, un projet et auquel M. Vattemare, par les conditions qu’il nous impose, arrive à donner le caractère d’un échange » (lettre du 29 décembre 1860). Taschereau était de mauvaise foi, car les monnaies et médailles avaient été données le 29 octobre 1860 (Inv. Mss 85, don F 142-523) à l’exception d’un jeton donné le 17 mai 1861 (don F 593). Quant aux conditions imposées, à savoir la publication par Vattemare d’un catalogue de ces pièces, elles ne semblaient pas démesurées, puisque c’est avec ce don que le Cabinet, qui possédait jusqu’alors 26 monnaies américaines, a assis sa réputation dans ce domaine particulier. Ce catalogue fut finalement publié en 1861 et la collection Vattemare reste encore aujourd’hui la base de la collection de monnaies et médailles américaines du département. La structure de ce catalogue se présente ainsi : A. Vattemare, Collection de monnaies et médailles de l’Amérique du Nord de 1652 à 1858 offertes à la Bibliothèque Impériale, Paris, 1861, in-8°, 135 p. Monnaies, p. 15-72 Première période (1652-1775), p. 33-35, n° 1-12 Deuxième période (1775-1793), p.37-46, n° 1-58 Troisième période (1793-1858), p. 47-66, n° 1-169 Quatrième période. Pièces taractiques, p. 67-70, n° 1-16 Médailles, p. 73-120, n° 1-121 + 5 (Supplément) 382 pièces sont décrites (en effet Vattemare avait fait don de 382 pièces en 1860 et d’un jeton en 1861, mais le don F 142 lui fut rendu car c’était un double).
P.-A. Tilliette (avec la coll. De B. Tardif), Catalogue du fonds des États-Unis d’Amérique, Les collections de la Bibliothèque administrative de la Ville de Paris, 7, Paris, 2002, p. 11-54 (étude sur Vattemare et la bibliothèque américaine de la Ville de Paris, avec bibliographie antérieure).
Les Catalogues imprimés de la Bibliothèque nationale : liste, description, contenu, Paris : Bibliothèque nationale, 1943, Méd. 48
Valton, Prosper
Prosper Valton est né en 1834, dans une famille bourgeoise qui lui permit, toute sa vie, de se livrer aux plaisirs des arts et de leur connaissance. « Cet érudit affable et modeste qui connaissait et appréciait mieux que personne l’art des médailleurs italiens de la Renaissance » (Henri de La Tour , Rev. num. 1906, p. 502) n’a pas seulement collectionné les monnaies grecques et les médailles de la Renaissance, il a d’abord « manié l’ébauchoir en même temps que le pinceau et le crayon » (Id., Ibid.). Vers 1863, par l’intermédiaire de son amis His de la Salle, il fait la connaissance de l’architecte et collectionneur Alfred Armand qui, retraité, se consacrait à sa passion pour l’art. Valton l’intronisa dans la Société française de gravure où l’avaient conduit ses compétences et sa pratique. Leurs affinités les conduisirent à travailler ensemble autour des impressionnantes collections d’Armand : photographies, gravures, dessins, dont une grande partie furent légués directement par Armand au Cabinet des estampes en 1888, date de sa mort. Ses autres collections, les médailles et moulages de médailles italiennes, le reste de la collection de dessins, Armand les avait léguées à Valton, scrupuleux continuateur de l’œuvre, avant que d’en devenir en quelque sorte l’exécuteur testamentaire : il poursuivit la construction de la collection de médailles italiennes, remplaçant tel exemplaire médiocre par un autre meilleur, tel moulage par la médaille enfin découverte, et surtout il tint à jour les fiches du grand-œuvre d’Armand auquel il avait largement et modestement collaboré : Les médailleurs italiens des quinzième et seizième siècle, Plon, 1879, dont une deuxième édition, largement augmentée, était parue en trois volumes de 1883 à 1887. Ce sont ces médailles, et la documentation (les fiches) qui avait été formée autour, que Valton a léguées au Cabinet des médailles. Elles y sont entrées en 1906, année de sa mort, avec la petite mais importante collection de monnaies antiques. Cette dernière lui appartenait entièrement : elle est la manifestation la plus parfaite, quoique discrète, comme la personne de son concepteur, du goût et de l’érudition de Prosper Valton. « Telle y est d’ailleurs la beauté des exemplaires que, toujours ou presque toujours, ils surpassent ceux de l’ancien fonds du Cabinet de France, et, à ce seul point de vue, le legs Valton constitue pour le médaillier national un enrichissement considérable. » (Jean de Foville.)
articles sur les médailles italiennes dans RN 1885, 1887, 1905. « Alfred Armand », nécrologie, RN 1888, p. 476-479.
Sur Prosper Valton : Henri de la Tour, « Prosper Valton », nécrologie, RN 1906, p. 502-508. Ernest Babelon, « La collection Armand-Valton », Revue de l'Art, octobre 1908. Jean de Foville, «Préface » dans Les monnaies grecques et romaines de la collection Valton, Paris, 1917 (repris de : RN 1909, p. 1-35, 209-228, 297-320, 481-499, pls. I-II, VII-VIII, XIII ; RN 1910, p. 129-160, pl. VI ; RN 1911, p. 166-188 ; RN 1912, p. 41-83, 205-235, 335-371, 480-499, pl. VII).
La donation Alfred Armand figure au registre d’acquisition H., p. 169-175, et est détaillée dans l’inventaire manuscrit MMA 103.
Les Catalogues imprimés de la Bibliothèque nationale : liste, description, contenu, Paris : Bibliothèque nationale, 1943, Méd. 36. Inventaire manuscrit MMA-103
Fonds Torcy
Entré à la BnF en 1906 à la suite d’un legs (qui, par ailleurs, concernait le musée de Cluny ainsi que le musée de l’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye), le fonds Torcy est composé de quelques intailles et objets (bague en or, cuiller en argent, statuettes religieuses et icône : registre H n° 1530 à 1539), d’ouvrages anciens et modernes, mais surtout de monnaies antiques essentiellement romaines : a) une soixantaine de monnaies d’or d’Auguste à Héraclius (registre H n° 1557 à 1600) b) des monnaies d’argent de la République et de l’Empire (registre H n° 1627 à 1646) c) des grands bronzes impériaux de Tibère à Salonin (registre H n° 1601 à 1623) d) des moyens bronzes impériaux (registre H n° 1647 à 1654) e) des bronzes du Bas-Empire (registre H n° 1624 à 1626, 1654)
A cet ensemble, il convient d’ajouter quelques monnaies gauloises (registre H n° 1657 à 1663), du royaume du Bosphore (registre H n° 1655) et d’Alexandrie (registre H n° 1656). Torcy, dont nous ne savons rien, avait également légué son médaillier (registre H n° 1556), en bois noirci de style Renaissance, qu’un administrateur a choisi pour agrémenter son appartement de fonction, avant qu’il ne retrouve il y a quelques années sa place au cabinet.
Jean -Charles Seguin (Paris,1857-1908) est le descendant d’une grande famille d’industriels originaires d’Annonay (Ardèche). Les cinq frères Seguin, Marc (1786-1875), Camille (1793-1852), Jules (1796-1868), Paul (1797-1875 et Charles (1798-1856) avaient révolutionné l’industrie française par leurs innovations techniques. Auteurs de 186 ponts suspendus, ils avaient également amélioré les transports ferroviaires par l’utilisation de la machine à vapeur et de nouveaux types de rails. Fils de Paul et de Thérèse Seguin, fille de Camille, Jean-Charles Seguin vécut de l’héritage familial dans son hôtel du 8 rue de Penthièvre et dans sa propriété de Saint-Cloud. Au cours de ses nombreux voyages, il réunit une collection d’objets d’art, notamment du Moyen-Age, de la Renaissance et du XVIIIe siècle. Une partie fut léguée au Musée du Louvre, à concurrence d’un million de francs. Par testament du 19 décembre 1901, il lègua tous ses camées et pierres gravées, montées ou non montées, au Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale. Ce legs ne fut accepté par le Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts que le 28 août 1909 après avis favorable du comité consultatif de la Bibliothèque Nationale le 30 janvier 1909. Les 570 pierres gravées sont inventoriées dans le registre d’entrée H, sous les numéros 2413 à 2983. La plupart sont des intailles d’époque moderne, probablement récoltées en Italie. Un certain nombre sont signées de graveurs romains, notamment des frères Pichler et de Berini (1790-1861). Signalons deux très belles intailles de Luigi Pichler (1773-1854), représentant la mort de Laocoon et le Taureau Farnèse. Une trentaine d’intailles en améthyste ou cornaline proviennent de la collection du Prince Poniatowsky (1754-1833). Ce dernier, installé à Rome à partir de 1800, commanda à des artistes des pierres gravées sur des thèmes antiques, qu’il fit signer de noms de graveurs grecs illustres ou inventés.