Les documents cartographiques du Service hydrographique de la Marine sont parvenus à la Bibliothèque nationale en trois étapes, mais pas dans leur totalité. Au début de 1942, 45 pièces de grande valeur, dont 32 cartes manuscrites sur vélin furent extraites des “ Grandes Archives ” pour être mises en dépôt au Département des cartes et plans. En 1947, le Service hydrographique de la Marine à l’étroit dans ses locaux rue de l’Université déposait 14 566 pièces toutes antérieures à 1800, dont 237 cartes manuscrites sur vélin, classées chronologiquement par grandes régions côtières en 224 portefeuilles. Enfin en 1962 et 1965, le Département reçut les cartes de 1800 à 1940, gravées pour la plupart et réparties de la même manière ; d’autre part l’établissement public du Service hydrographique et Océanographique de la Marine (http://www.shom.fr) effectue le dépôt légal de la production contemporaine. La première formation des archives de la Marine remonte à Colbert, mais ce n’est qu’en 1699 que fut créé un dépôt comprenant d’une façon générale, les papiers de la Marine, des Galères, des Colonies et de la Maison du Roi et les cartes et plans hydrographiques. De 1720, date de la création du “ Dépôt général des cartes et plans, journaux et mémoires ” dont les ingénieurs étaient chargés de collecter, conserver et créer les documents hydrographiques, à 1722 s’opère le premier démembrement entre cartes, journaux et archives. Une seconde grande division intervînt pendant le XXe siècle, entre plusieurs institutions parisiennes. Si la plus grande partie des cartes et plans sont à Richelieu, les archives du Service hydrographique de la Marine, dont les journaux de bord, constituent la série JJ des Archives nationales, tandis que d’autres fractions ont été confiées à la Bibliothèque de l’Observatoire, à celle de l’Assemblée nationale, et des cartes manuscrites séparées ou en album sont au Service historique de la Marine (minutes du canal du Midi et plans de secteurs militaires signés Vauban…) et au Musée de la Marine. Enfin, il convient de remarquer qu’une partie des pièces cartographiques relatives aux voyages de circumnavigation exécutés par des navigateurs français (1787-1839) et des missions hydrographiques effectuées dans toutes les régions du monde (1816-1890) se trouve dans la sous-série 6 JJ des Archives nationales. Plans cadastraux des villes côtières, parcellaires de zones côtières, trajectoires de navigateurs, scènes de combats sur mer, cartes de courants marins, cartes topographiques d’entrée de rivières, croquis et vues de côtes et d’îles, cartes marines de toutes les parties du monde forment un ensemble unique de plus de trente mille pièces allant du XIVe siècle à nos jours, d’un grand intérêt pour l’histoire de la Marine, de la navigation, des découvertes, des sciences et des techniques cartographiques, de l’art, mais aussi pour l’histoire politique, administrative et militaire. Parmi les pièces anciennes, il y a lieu de citer la mappemonde de Nicolas Caverio (1502), celles qui proviennent des travaux des cartographes dieppois, Dupont, Guerard, Levasseur, Devaulx, celles des portugais Guttierez et Texeira, celles des hollandais Jean Dircks (1599) et Stiermann (1614). On trouve également tous les documents provenant des premiers explorateurs du Canada, de La Salle, Franquelin et aussi ceux qui résultent des grands voyages de circumnavigation et de découvertes, tels que le voyage de Louis Freycinet et ceux de Dumont d’Urville. Le département possède la collection la plus complète des cartes marines françaises manuscrites et éditées depuis le commencement du XVIIIe jusqu’à nos jours et celle de presque toutes les cartes marines étrangères, mais la dispersion irrémédiable des archives et des documents cartographiques constitue pour le chercheur une gêne. Cependant l’ère du numérique pourra dans une certaine mesure la réduire.
Covillault, P. Histoire des archives et de la bibliothèque du Service hydrographique de la Marine. Paris, 1979 "Notice sur le Service hydrographique de la Marine". Annales hydrographiques, 2e série, 1914, p. 1-49 Taillemite, Étienne. Les archives de la Marine conservées aux Archives nationales. Paris, 1980 Taillemite, Étienne. "Les cartes anciennes du Service hydrographique de la Marine conservées aux Archives nationales". Dans : La carte manuscrite et imprimée du XVIe au XIXe siècle, Journée d’étude sur l’histoire du livre et des documents graphiques, Valenciennes 17 novembre 1981, p. 19-32.
Office universitaire de recherche socialiste, OURS (1969- )
Créé en 1969, l’OURS est une association loi de 1901 dont le but est d’être un lieu de rencontre et d’études sur l’histoire du mouvement socialiste en France. A cette fin, l’OURS donne accès à son fonds d’archives et à sa bibliothèque ; il organise des colloques et des journées d’études ; il publie les résultatsde ces recherches, notamment dans la revue Recherche socialiste et dans le mensuel l’OURS.
L’OURS est créé par Guy Mollet, au moment de la dissolution de la SFIO, afin de “ rassembler des chercheurs, des politiques travaillant dans un seul objectif : réfléchir sur le socialisme contemporain, à partir notamment de son histoire, et lui donner un corps doctrinal ” (Lefebvre, 1999, 13-33). Outre cette activité de recherche et de réflexion, on constate, plus de trente ans après sa création, qu’il a poursuivi cet objectif en suscitant le dépôt de plus de 50 fonds d’archives institutionnelles ou individuelles — celles du Parti socialiste SFIO, celles de la fédération de la Seine et les archives personnelles de Guy Mollet, de Maurice Deixonne, d’André Lebey, de Marcel Sembat... — qui sont communicables en fonction de leur accessibilité. La bibliothèque, ouverte largement aux chercheurs et étudiants, permet en outre la consultation de plus de 700 titres de périodiques et de plus de 15 000 monographies sur la vie politique française et le Parti socialiste.
Les collections imprimées peuvent être consultées directement sur place, au 86 rue de Lille à Paris. Les fonds audiovisuels ne pouvant l’être, l’OURS a noué, dès 1983, un partenariat avec le département de l’Audiovisuel de la Bibliothèque nationale de France pour assurer ses missions de conservation et de communication.
Dans ce cadre, l’OURS a fait le dépôt à la BnF de documents audiovisuels qui intéressent la recherche historique et politique contemporaine. Ces dépôts sont identifiés dans le catalogue par la mention “ collection de l’OURS ”. Parmi ceux-ci, on peut citer des enregistrements sonores des discours et débats publics ou internes de la SFIO ou du Parti Socialiste, des interviews, des déclarations, des documentaires sonores réalisés lors des congrès ou dans la rue, par exemple, au moment de la Guerre d’Algérie.
Le fonds sonore de l’OURS à la BnF est composé des supports suivants : • des disques 78 tours, comme ceux des marques La Voix des nôtres, Ersa, Voxigrave ou Piatiletka • des disques à gravure directe, type Pyral, servant avant les années 1960 à conserver les enregistrements radio ou les archives sonores inédites • des bandes magnétiques et cassettes audio.
Lefebvre, Denis. “ Jalons pour une histoire de l’OURS ”. Recherche socialiste, 1999, vol. 7, p. 13-33
Milhaud, Madeleine (1902-....)
Née en 1902, Madeleine Milhaud a toujours conservé le même patronyme puisqu’elle épouse à Aix-en-Provence, en 1925, son cousin le compositeur Darius Milhaud. Elle rapporte elle-même que le premier concert auquel elle assista, en 1914, comportait la Première suite symphonique de Darius Milhaud. A partir de cette date, elle fut de toutes les premières auditions du compositeur. Elle mène de nombreuses activités aux multiples facettes : collaboratrice de son époux, elle écrit le livret de son opéra Médée (1938) et la Mère coupable. Elle l’entoure de toute sa sollicitude au cours d’une vie assombrie très tôt par la maladie. Il lui dédie plusieurs œuvres, dont la Muse ménagère, suite pour piano évoquant la vie quotidienne. Mais elle développe également des activités indépendamment de son mari, jouant notamment au théâtre, où elle fut l’élève de Charles Dullin. En tant que comédienne, elle participe à des émissions de radio donnant des lectures de poèmes et faisant même de la publicité. Elle enseigne également et fait de la mise en scène, dont celle du Piège de Méduse d’Erik Satie. Durant leur séjour prolongé aux Etats-Unis, tout au long de la Seconde guerre mondiale, elle diversifie son action en faveur de la culture française : cours de diction et de littérature française à Mills college, dirige chaque été la Maison française, unique centre culturel français en Californie. Après la mort de Darius Milhaud, elle poursuit des actions pour faire connaître et perpétuer son œuvre. C’est dans cet esprit qu’elle dépose, en 1977, au département de la Phonothèque et de l’Audiovisuel, une collection de 110 enregistrements inédits, sur bandes magnétiques, comportant l’essentiel de l’oeuvre instrumentale, orchestrale et vocale de Milhaud, dont ses opéras (Esther de Carpentras, Maximilien, Médée…). Par ailleurs, elle a prêté des disques microsillons, publiés pour la plupart aux Etats-Unis, absents des collections patrimoniales, dont il a été réalisé des copies sur bandes magnétiques. Darius Milhaud s’intéressa beaucoup à la diffusion de la musique enregistrée, faisant partie des compositeurs-interprètes de leurs œuvres. A ce titre il réalisa plusieurs disques, dirigeant ses propres œuvres ou accompagnant au piano les interprètes, telle Jane Bathori. Lors de la création de l’Association des amis de la Phonothèque nationale en 1960, son directeur, Roger Décollogne, lui en offrit la pRéserve des livres raresidence qu’il assura jusqu’à sa mort en 1974. En contrepoint à ce don, le Département possède plusieurs enregistrements inédits de la voix du compositeur dont ses interventions à l’occasion des réunions de cette association et une interview réalisée en 1958 par Francine Bloch.
Bloch, Francine, Phonographies : Darius Milhaud, Paris, Bibliothèque nationale, département de la Phonothèque et de l’Audiovisuel, 1992 Collaer, Paul, Darius Milhaud, Genève, Paris, Slatkine, 1982 Milhaud, Darius, Ma vie heureuse, Paris, Belfond, 1973 Milhaud, Darius, Notes sur la musique : essais et chroniques, Paris, Flammarion, 1982
Madeleine, épouse Milhaud : entretiens avec Jean Roy et Olivier Bernager. Michel Dieuzaide, réal. ; Olivier Bernager, dir. artistique. Prod. 1992.
D’origine allemande (son patronyme est Bonickhausen), l’ingénieur Gustave Alexandre Eiffel est né à Dijon en 1832. Après avoir participé à la mise en place du réseau de chemin de fer français, il fonde en 1867 les Ateliers mécaniques de Levallois. Il s’illustre alors dans la réalisation d’ouvrages d’art métalliques d’une très grande audace (coupole de l’observatoire de Nice de 22 m de diamètre, en 1885). Abandonnant peu à peu la fonte pour le fer laminé en treillis, il réalise des ponts suspendus d’une portée inimaginable jusqu’alors (pont sur le Douro en 1877, viaduc de Garabit de 165 m en 1884). Le choix du projet “ aérien ” de Gustave Eiffel en 1886 pour réaliser le monument phare de l’Exposition universelle qui commémore le centenaire de 1789 est d’une grande audace.
Lorsque l’exposition ouvre, le 6 mai 1889, la foule qui se presse sur le tapis roulant peut découvrir deux merveilles technologiques, la tour métallique qui domine Paris de 1000 pieds et le phonographe d’Edison. L’inventeur américain est au pinacle de sa notoriété. Ses inventions sont présentées à deux endroits, dans la section des États-Unis et dans un pavillon qu’il a conçu à cet effet et qui remporte immédiatement le succès. Quelques jours après, Edison rencontre Eiffel. Il est invité dans le salon de l’ingénieur au 3ème étage de la tour. On sait que Thomas Edison donne alors un phonographe Class M à Eiffel (ou le lui fait parvenir quelques mois plus tard). Une dédicace signée le 10 septembre 1889 par l’inventeur américain indique : “ To M. Eiffel, the brave builder of so gigantic and original specimen of modern engineering, from one who has the greatest respect for all Engineer including the Great engineer, the Bon Dieu ”. La rencontre entre les deux hommes s’arrête là.
Edison présente son invention à l’Académie des sciences et continue son voyage promotionnel parmi les grandes cours d’Europe. Le phonographe que possède Eiffel reste alors l’un des seuls spécimens sur le continent européen. Le class M est en effet le premier phonographe a avoir été construit industriellement par la North American Phonograph Cy (depuis juillet 1888). Il est alors très peu vendu. Conçu pour faciliter le travail des dactylographes, son succès viendra dès 1893-1895 par le détournement d’usage qui le transforme en appareil de loisir. Eiffel, quant à lui, s’en servira exclusivement pour enregistrer des voix lors de réunion familiale ou amicale. On peut supposer qu’il a lui même raboté plusieurs cylindres, comme cela était prévu par le constructeur. Ceux qui nous sont parvenus ont été enregistrés en février et mars 1891 ou début 1898. Ils nous restituent, outre la voix d’Eiffel, celle d’Ernest Renan, de l’astronome Jules Janssen, de l’écrivain Vallery-Radot et du physicien Eleuthère Mascart. Une autre série contient les voix des enfants et petits enfants de Gustave Eiffel, des poèmes lus et divers enregistrements. L’attribution des voix, pour certains enregistrements, est encore incertaine. Ces cylindres constituent donc les plus anciens enregistrements réalisés en France conservés jusqu’à aujourd’hui. Cette transmission a été faite grâce à Jean Thévenot, homme de radio, qui les redécouvre en 1953 chez les descendants d’Eiffel, grâce aussi au Musée d’Orsay à qui ils ont été donnés et qui les a déposé à la BnF (arrêté ministériel du 23 juin 1988).