La succession de Pierre Boulez a remis gracieusement à la Bibliothèque nationale de France un ensemble considérable d’archives du compositeur : 220 mètres linéaires de livres, 50 mètres d’archives et de correspondance, mais aussi des partitions, des photographies, disques et bandes magnétiques ainsi qu’une centaine d’objets. Dans le même temps, la Bibliothèque a acquis le manuscrit du premier chef-d’œuvre de Pierre Boulez, les Douze notations pour piano.
Le compositeur et chef d’orchestre Pierre Boulez (1925-2016) a profondément marqué la vie musicale, culturelle et institutionnelle de la seconde moitié du XXe siècle tant par la nouveauté de son langage musical que par ses talents d’interprète, de pédagogue, de théoricien et de polémiste mais aussi par son implication institutionnelle : il est à l’origine, notamment, de la création du Domaine musical, de l’IRCAM et de l’Ensemble Intercontemporain. De son vivant, Pierre Boulez a cédé ses manuscrits musicaux et littéraires à la Fondation Paul Sacher tandis que la Bibliothèque nationale de France s’enrichissait, par acquisition et par don du mécène, critique musical et organisateur de concerts Pierre Souvtchinsky, d’ensembles de correspondance et surtout d’une importante série de manuscrits d’œuvres de jeunesse du compositeur : Psalmodie, la Première sonate pour piano, la Sonatine pour flûte et piano, Visage nuptial, Structures. À la suite du décès de Pierre Boulez, sa succession a décidé de remettre gracieusement à la BnF toutes les archives du compositeur qui n’étaient pas couvertes par son contrat avec la Fondation Paul Sacher : bibliothèque, partitions, correspondance, archives, objets, photographies, manuscrits d’autres compositeurs... Par ailleurs, lors de la vente organisée par Christie’s France le 28 novembre dernier, la BnF a acquis le manuscrit du premier chef-d’œuvre de Pierre Boulez, les Douze notations pour piano. Écrites par le compositeur alors qu’il n’avait que 20 ans et qu’il était encore l’élève d’Olivier Messiaen au Conservatoire de Paris, les Douze Notations sont influencées par l’enseignement de René Leibowitz, qui initia Pierre Boulez à la technique dodécaphonique. Il s’agit, en effet d’une série de douze variations construites autour d’une même série de douze sons, traitée en permutation circulaire. L’œuvre fut créée le 12 février 1946 aux Concerts du Triptyque par la pianiste Yvette Grimaud.
Riche de 429 cotes, le fonds mexicain est fondé pour sa majeure partie sur la collection qu'Eugène Goupil, « né au Mexique, de père français et de mère mexicaine descendante des Aztèques en ligne directe », avait acquise en 1889 à Paris de Joseph-Marie Aubin dans « l'intention de la léguer à la Bibliothèque Nationale ». Dès 1891, il en avait fait publier le catalogue établi par Eugène Boban où l'on trouvera détaillée l'histoire de la collection réunie par Joseph-Marie Aubin au Mexique entre 1830 et 1840. Lorsque la veuve d'Eugène Goupil exécuta sa volonté et offrit cette extraordinaire collection à la Bibliothèque en 1898, le fonds mexicain ne comptait que 17 numéros pour 16 volumes. Cet « Ancien Fonds », dont le premier manuscrit, le Codex Telleriano-Remensis avait été donné à la Bibliothèque du roi en 1700 par Charles-Maurice Le Tellier, archevêque de Reims, fut recoté à la suite de la collection Goupil ; il occupe désormais les numéros 385 à 400 du fonds mexicain. Les manuscrits entrés ultérieurement proviennent presque tous du comte de Charencey (nos 403 à 426) ; beaucoup avaient fait partie de la collection de l'abbé Brasseur de Bourbourg puis de celle d'Alphonse Pinart. Il est à noter que les manuscrits que la Bibliothèque acquit à la vente Pinart en 1884 ont été intégrés au fonds américain (nos 38 à 71 et 73) ; ceux, de même origine, donnés par le comte de Charencey ont été adjoints au fonds mexicain, à l'exception de trois, cotés américain 75 à 77. Il s'agit d'un fonds « composite », comportant des manuscrits pictographiques originaux (70 environ), avec leurs copies anciennes, de première importance, dues à Don Antonio de Léon y Gama ou au père José Pichardo, quelques fac-similés, des notes ou études sur les manuscrits, mais aussi des cartes et des descriptions géographiques, ainsi que des textes historiques. Les langues nahuatl, otomi, maya voisinent avec l'espagnol ou le français, parfois sur le même document riche de gloses et de commentaires successifs.
« Fonds étrangers. Dialectes américains ». ["Fonds mexicain", 17 numéros. Non folioté. Il est actuellement conservé dans le fonds des manuscrits mexicains, sous la cote Mexicain 429].
Notice rédigée par Monique Cohen et Laurent Héricher, Bibliothèque nationale de France. Disponible en ligne, url : http://archivesetmanuscrits.bnf.fr/ark:/12148/cc4472q.
Le fonds des manuscrits américains de la Bibliothèque nationale de France comprend 77 manuscrits relatifs à une soixantaine de langues ou dialectes de l’Amérique, datant des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Ils concernent le Canada, l’Amérique du Nord, Terre-Neuve, le Mexique, le Guatemala, l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Chili, l’Équateur, la Guyane, le Paraguay. Les manuscrits mexicains (aztèques et mayas) forment un fonds spécifique. Avant 1860, ces manuscrits étaient inscrits dans le Supplément français. Le noyau de la collection est constitué de dix volumes concernant les dialectes de l’Amérique centrale, recueillis par Clérambault, en juillet 1837, auxquels s’ajoutèrent en 1857 dix volumes de la collection d’Alcide Dessalines d’Orbigny (1802-1857), relatifs à des dialectes d’Amérique du Sud, puis, en 1883, 37 manuscrits de la collection de l’abbé Brasseur de Bourbourg (1814-1874) provenant eux-mêmes de la bibliothèque d’Alphonse Pinart (1852-1911). Par la suite, des dons et des achats ont complété ce fonds : en 1898, trois manuscrits ont été donnés par le comte de Charencey. La plupart des ouvrages sont des traductions, faites par des missionnaires, de textes religieux en langues indiennes (catéchismes, vies de saints, doctrine, sermons, sacrements) et de nombreux vocabulaires et grammaires, parfois de langues actuellement disparues (cf. Kitemoka, de la famille çapakura, de la région des rives du Rio Blanco en Bolivie, ou Kanicana du Rio Machupo). À noter le numéro 57 qui est une Histoire universelle jusqu’à la conquête, en kiçe. À la différence du fonds mexicain où se trouvent des documents d’origine indienne, ces manuscrits sont le plus souvent de mains européennes. Tous sont en écriture latine, excepté le numéro 34 en hiéroglyphes des Indiens Mikemak de Terre-Neuve.
Notice descriptive de collection, Bibliothèque nationale de France, 2007. Disponible en ligne, url : http://archivesetmanuscrits.bnf.fr/ark:/12148/cc4408r.
Alsacien destiné par ses parents à une carrière dans l'industrie, Jean-Baptiste Weckerlin apprend la musique essentiellement en autodidacte avant de s'enfuir à Paris en 1843 pour suivre l'enseignement du Conservatoire. Là il vit de leçons, dirige diverses chorales et participe en 1849 avec François Jean Baptiste Seghers à la fondation de la Société Sainte Cécile dont il assure la direction du chœur pendant cinq ans.
Il n'est guère passé à la postérité en tant que compositeur, bien qu'ayant écrit des œuvres chorales, scéniques, pour orchestre, piano ou formations de chambre, et surtout des centaines de mélodies, compositions propres ou arrangements à partir de motifs populaires. Il nous est bien connu en revanche pour son activité d'historien et de musicologue : éditions de chansons et d'œuvres scéniques françaises anciennes ; publication d'ouvrages sur des sujets aussi divers que la chanson populaire, la typographie musicale, l'instrumentation, ou encore des anecdotes musicales ; collaboration à la Revue et gazette musicale, au Ménestrel, ainsi qu'au supplément de la Biographie universelle des musiciens de Fétis sous la direction d'Arthur Pougin.
Ces différentes facettes de son activité, jointes à sa passion pour la bibliophilie, le portent aux fonctions de bibliothécaire et archiviste de la Société des auteurs et compositeurs de musique. Sur la recommandation de Daniel François-Esprit Auber, il est nommé sous-bibliothécaire puis bibliothécaire au Conservatoire, fonction occupée avant lui par Hector Berlioz et Félicien David. Sous son impulsion, la bibliothèque devient en une trentaine d'années, de 1876 à 1909, l'une des plus riches du monde : non content d'avoir multiplié par deux le nombre de volumes disponibles (de 15000 à 30000), il n'hésite pas à se déplacer à l'étranger pour acquérir manuscrits originaux (500), portraits d'artistes (plus de 4000), estampes, lettres autographes et autre recueils de brochures. Il en établit également le premier Catalogue (Bibliothèque du Conservatoire national de musique et de déclamation : catalogue bibliographique orné de huit gravures avec notices et reproductions musicales des principaux ouvrages de la réserve. Paris : Librairie de Firmin Didot et cie, 1885.)
Parallèlement, il constitue à titre personnel une collection exceptionnelle, dont il cède à Charles Malherbe en avril 1908 une partie importante consacrée au folklore. Les ouvrages restants seront vendus aux enchères à Leipzig en mars 1910, quelques mois avant sa mort.
Le fonds Weckerlin à la BnF
Charles Malherbe avait acheté ces 2600 pièces pour la Bibliothèque de l'Opéra (dont il était alors archiviste), bibliothèque qui sera par la suite rattachée à la Bibliothèque nationale en 1935, ce qui explique la présence du fonds au Département de la musique. Il s'agit de livres, recueils et manuscrits relatifs au folklore musical français et étranger. Si l'on excepte quelques volumes de chansons françaises et italiennes du XVIe siècle, la collection couvre la période allant du XVIIe au XIXe siècles. Les ouvrages des éditeurs Ballard, en particulier, sont bien représentés, mais des chansonniers modernes en langues étrangères, européennes ou orientales, viennent également compléter la collection. Le catalogue de ce fonds existe uniquement sous la forme d'anciennes fiches manuscrites, qui furent photocopiées puis reliées pour être classées :
François Lesure, « The Music department of the Bibliothèque nationale », Notes / Music library association, 1978, p. 251-268.
Xylo (pour Xylographie)
Cote sous laquelle ont été regroupés les livres xylographiques de la Réserve des livres rares.
Les livres xylographiques, auxquels ont été joints quelques placards, correspondent à un moment et à une technique très particulière dans l’histoire du livre occidental. Composés de suites d’images, ils sont imprimés à l’aide de planches de bois gravées, le texte étant soit ajouté à la main, soit lui aussi gravé sur bois. Ils furent fabriqués dans les anciens Pays-Bas, le long du Rhin et en Allemagne du Sud, entre 1450 et 1470. On y trouve des sujets religieux, extraits des Ecritures, ouvrages de catéchèse, vie des saints, l’Ars moriendi et la Danse macabre, mais aussi des calendriers, des manuels de chiromancie et des fables. Fort recherchés par les collectionneurs dès le XVIIIe siècle, ils sont aujourd’hui extrêmement rares. La BnF en possède une quarantaine, provenant essentiellement des saisies révolutionnaires et des confiscations effectuées lors des guerres napoléoniennes selon les instructions de Joseph Van Praet. Outre les livrets qui portent la cote Xylo, il en existe quelques autres restés dans d’autres collections de la Réserve (Vélins, Smith-Lesouëf), ou conservés aux départements des Estampes et des Manuscrits. Tous sont décrits dans la liste des xylographes, en tête du fascicule A du Catalogue des incunables de la BnF (Paris, 1992). Les xylographes de la réserve ne sont communiquées qu’avec autorisation du directeur de la Réserve des livres rares, sur demande écrite. Ils sont tous consultables sur microfilm.
Des livres rares depuis l'invention de l'imprimerie : [exposition, Bibliothèque nationale de France, 29 avril-26 juillet 1998]. Paris : BnF, 1998, p. 23-25.