Delepierre, Jean et Marie
La donation Jean et Marie Delepierre, reçue en 1966 « peut être considérée comme la plus remarquable qui ait été remise au Cabinet des médailles depuis celle du duc de Luynes en 1862 » (Georges Le Rider). La donation faite à l’État par Marie Delepierre, trois ans après la mort de son mari, compte quelque 8000 monnaies grecques, d’or, d’argent et de bronze, et quelques 260 de ces objets (« marbres, bronzes, vases et même bijoux ») « qui fournissent les correspondances nécessaires pour l’exégèse et la chronologie des monnaies » (Marie Delepierre)
Né à Montreuil-sur-Mer le 9 octobre 1889, Jean Delepierre fut saisi dès sept ans par la passion numismatique. D’abord les monnaies romaines, trouvées localement dans des brocantes ; les catalogues de vente qu’il se fait envoyer. La découverte des monnaies grecques, à onze ans, oriente définitivement sa collection. Après des études de droit, il fuit sa ville natale et les projets que son père nourrissait pour lui ; à Paris, il subsiste tant bien que mal tout en travaillant la numismatique et l’archéologie. Il envisage un temps d’enseigner l’histoire, ou d’entrer au Cabinet des médailles. L’épreuve de la Grande Guerre conduit l’officier d’artillerie qu’il était, affecté à l’Inspection des Forges, « témoin d’une partie de la mobilisation industrielle du pays » (journal JD), à choisir en 1919 de se mettre au service du pays en entrant dans l’Administration (ministère du Commerce et de l’industrie).
C’est l’amour de la Grèce et la connaissance des monnaies qui le rapprochent de celle qui allait devenir son épouse (1932) et sa collaboratrice, Marie Sisco. Née en 1896, elle avait acquis un savoir et des diplômes remarquables pour une jeune fille de ce temps : diplômée de philosophie, licenciée en droit, certifiée en archéologie grecque… Elle aussi, pendant la guerre se mit au service de son pays, dans le cadre du Phare, œuvre au service des aveugles de guerre ; elle traduisit en Braille, pendant plusieurs années, les textes grecs au concours de l’agrégation.
Leurs activités de Réserve des livres raresistants pendant la Seconde Guerre valurent à Jean une certaine mise à l’écart professionnelle. Cette retraite avant l’heure les conduisit à « chercher dans l’étude un refuge ». La Libération le rétablit dans son honneur et ses fonctions. Après sa retraite, en 1954, le couple dédia ses dix dernières années à voyager en Grèce, et accroître la collection.
Marie Delepierre survécut 10 ans à Jean, décédé le 7 octobre 1963. Elle les consacra à contribuer, avec Georges Le Rider, au catalogage scientifique de leur collection donnée au Cabinet des médailles. Après sa mort, le 19 février 1974, l’œuvre fut poursuivie par Hélène Nicolet.
Bibliographie ; Syllogè Nummorum Graecorum, France I : Collection Jean et Marie Delepierre, Bibliothèque nationale, Cabinet des médailles, [rédigé par Hélène Nicolet ; avec la collaboration de Jean et Marie Delepierre, Georges Le Rider], Paris, Bibl. nat., 1983.
Sur Jean D. , notice nécrologique par Pierre Devambez, REG 1964, p. XXVIII-XXVIX ; M. Delepierre, « Jean Delepierre », Syllogè (non paginé : 3 p.) Sur Marie D., notice nécrologique par Francis Vian, REG 1974, p. XXIX-XXX ; G. Le Rider, « Préface » à la Syllogè (non paginé : 2 p.).
Sylloge nummorum Graecorum… Paris : BN, 1983