Boisgelin, Henri Louis - De Clercq, Louis Henri Louis Boisgelin, St –Cyr-sur-Loire (Indre et Loire) 1897-Paris 1985 Petit neveu et héritier de la riche collection d’archéologie de Louis De Clercq (Oignies, Pad-de-Calais, 1836-Oignies 1901), il offrit en 1967 au Musée du Louvre de faire un choix des pièces les plus importantes - plus de 600 - sous condition qu’elles soient exposées. G. Le Rider, directeur du Cabinet des Médailles, aidé d’Henri Seyrig, fut de son côté autorisé à sélectionner les pierres gravées et les monnaies les plus intéressantes pour la Bibliothèque nationale. Ce don généreux rendait hommage à la volonté de son oncle, Louis De Clercq, d’enrichir les collections publiques françaises, volonté que ce dernier n’avait eu le temps de mettre à exécution. Alexandre de Boisgelin, beau-frère de Louis De Clercq, avait fait partie, en 1854, d’une mission archéologique en Syrie, menée par Melchior de Vogüé. Grâce à ces relations, le jeune Louis De Clercq accompagna en 1859, en tant que photographe, l’archéologue Guillaume Rey pour une étude des châteaux forts des Croisés en Syrie. Les cinq mois de sa mission achevés, il continua son voyage, photographiant les monuments de Jérusalem, de l’Egypte et de l’Espagne musulmane. Deux cent vingt-deux clichés furent publiés par ses soins, à compte d’auteur, à son retour à Paris, dans un Recueil photographique comprenant six tomes en cinq volumes(cf. département des Estampes et de la Photographie). Au cours de ce voyage, De Clercq s’était lié avec le premier interprète du consulat de France à Beyrouth, devenu quelques années plus tard consul de France à Beyrouth, Napoléon-Antoine Péretié, ami et conseiller du duc de Luynes. C’est de lui qu’il acquit ses premiers antiques, qui furent à l’origine de sa vocation d’archéologue et de collectionneur. Il n’aura par la suite de cesse de compléter ses séries : il retourne en Syrie en 1862-1863, puis en 1893, en compagnie de son neveu Georges de Boisgelin. De France, il reste en correspondance avec les principaux antiquaires de Syrie et surtout avec son ami Péretié, auquel il achète des séries entières, leur commanditant des fouilles. La riche collection ainsi réunie est décrite dans sept gros volumes, publiés à Paris entre 1885 et 1911, sous le titre Collection De Clercq. Catalogue méthodique et raisonné. Les deux premiers, consacrés à la glyptique et aux antiquités orientales, sont dûs à Louis De Clercq et Joachim Menant ; les suivants, consacrés aux antiquités gréco-orientales, sont de André de Ridder. Le grand intérêt de la collection provient de sa cohérence scientifique : l’objectif de De Clercq, clairement exprimé dans la préface du premier volume, est de réunir des objets « provenant directement de fouilles dans un pays déterminé selon un plan fixé d’avance », c’est-à-dire de la Phénicie, ayant été « frappé par la variété des richesses archéologiques que contenait la Phénicie ». Son champ d’action, d’abord limité aux objets trouvés sur le sol de Syrie s’étend par la suite à Chypre et à la Mésopotamie. La collection de pierres gravées offre un double intérêt : d’une part, la provenance des objets est très souvent connue ; d’autre part, beaucoup d’intailles et de camées ont conservés leurs montures antiques d’origine. La plupart sont en outre des pièces de grande qualité. La numérotation en usage actuellement reprend celle des publications : - Collection De Clercq. Catalogue t. II, 1ère partie. Cylindres orientaux (n° 1 à 397) . Sont entrés à la Bibliothèque les 180 cachets orientaux décrits p. 3 à 54 sauf 3 numéros. - Ibid, tome VII, 2e partie. Pierres gravées (n° 2401 à 3535). Sont entrés 19 camées, 341 intailles (plus 18 intailles modernes non cataloguées par de Ridder). La liste précise en est donnée dans la Revue Numismatique 1968, p. 32. Il faut y ajouter 14 bijoux catalogués dans le t. VII, 1ère partie - les monnaies ont été publiées pour la première fois par G. Le Rider et H . Seyrig, dans deux volumes de la Revue numismatique : IX, 1967, p. 7-53, pl. I-X : 259 monnaies séleucides, recueillies en Syrie et au Liban ; X, 1968, p. 7-33, pl. I-VIII : 184 monnaies syriennes, phéniciennes et diverses. Issu d'une riche famille du Pas-de-Calais, futur député, Louis de Clercq manifesta un intérêt précoce pour l'archéologie. Il aurait aussi été le jeune courrier de Napoléon III en 1859 pendant la guerre d'Italie, portant les dépêches entre Paris et les résidences impériales de Saint-Cloud, Fontainebleau et Compiègne. Au même moment, son beau-frère Alexandre de Boisgelin apprenait par son ami l'archéologue Melchior de Vogüé qu'Emmanuel-Guillaume Rey (1837-1916) cherchait un assistant pour l'accompagner en Orient dans une mission obtenue auprès du ministère de l'Instruction publique. À la fin de l'année 1859, Louis de Clercq sollicita donc auprès de l'administration des Beaux-Arts une mission pour accompagner Rey. Cette expédition avait pour but d'étudier les châteaux forts des croisés en Syrie, auxquels Guillaume Rey souhaitait consacrer un ouvrage illustré par la photographie. L'archéologue et son photographe quittèrent Paris en août 1859, débarquèrent à Lattaquié et voyagèrent ensemble pendant cinq mois. Ils se quittèrent en janvier 1860 à Jérusalem après avoir réalisé les vues souhaitées par Rey. Celui-ci rédigea alors à l'intention du ministre de l'Instruction publique un rapport décrivant le travail accompli et annonçant la publication des résultats. Mais de Clercq avait pris goût à la photographie de voyage et à l'archéologie. Il continua son périple pour son propre compte, photographiant Jérusalem, l'Égypte et, pour finir, l'Espagne, dont il souhaitait, à des fins de comparaison, voir les monuments mauresques. Sa vision de l'architecture, servie par les beaux formats de ses tirages et sa maîtrise du négatif sur papier ciré sec, est ample et harmonieuse. De retour à Paris, il publia à compte d'auteur, à cinquante exemplaires, un monumental ensemble de six tomes en cinq volumes comprenant deux cent vingt-deux tirages. Il "trahissait" donc Rey en exploitant des photographies faites pour lui, même s'il les incluait dans l'ensemble plus vaste et étranger au projet initial qu'était devenu son propre voyage. Dans un article publié tardivement, en 1881, alors qu'il est devenu un très grand collectionneur d'antiquités, il retrace l'historique de cette expédition, en ne se présentant même plus comme un jeune assistant mais comme un archéologue voyageur indépendant : il ne mentionne même pas la présence de Rey, et c'est à peine s'il concède que "les découvertes que j'ai faites ne sont pas demeurées complètement inédites ; j'ai eu le plaisir de les mettre à la disposition de M. E.-G. Rey, qui en a utilisé une partie pour son ouvrage sur l'architecture militaire des croisés". Les exemplaires qui furent transmis au château de Fontainebleau par la bibliothèque du Louvre étaient sans doute un don du photographe au souverain qu'il avait servi avant son départ. Malheureusement, dès cette époque, le deuxième album, consacré aux châteaux des croisés, manquait. On imagine mal qu'il ne l'ait pas offert alors que sa mission officielle portait justement sur ce point d'histoire. Avait-il été conservé par l'empereur à titre personnel ou prélevé par un amateur indélicat ? Le même cadeau fait à la Société française de photographie en 1861 par de Clercq participant à l'exposition biennale de la Société, est, lui, resté composé des cinq albums au complet.
« La donation L. De Clercq-H. de Boisgelin », La Revue du Louvre, 1968, n° 4-5, p. 299-346. Une biographie de Louis De Clercq a été écrite par E. Babelon dans l’introduction du tome III du Catalogue.
Revue numismatique, 1967, p. 7-53 et 1968, p. 7-40