Fonds Enfantin ou fonds saint-simonien
Barthélémy-Prosper Enfantin (1756-1864)
Barthélémy-Prosper Enfantin fut l'un des principaux chefs de file du saint-simonisme et de toute évidence le personnage le plus charismatique de ce mouvement.
Le comte de Saint-Simon, descendant du célèbre duc, avait sa vie durant développé une philosophie fondée sur l'idée que le destin des hommes est de travailler pour produire, sous la houlette des plus savants d'entre eux. Ces idéaux hostiles aux privilèges de la naissance lui valurent de finir sa vie en 1825 dans le plus grand dénuement, mais entouré d'un petit nombre de disciples fervents dont Enfantin, Rodrigues, Bazard. Ces derniers fondèrent une école de pensée qui fit rapidement des émules. Dans les années 1827-1828, les saint-simoniens s'organisèrent en "Famille" strictement hiérarchisée et firent de leur école une religion professée par des "apôtres". Les saint-simoniens exposaient leur doctrine lors de séances publiques enflammées et par le biais d'organes de presse propres (Le Producteur, L'Organisateur, Le Globe) : - la destination de l'espèce humaine est de travailler, ce qui n'aurait de sens sans l'amélioration du sort de "la classe la plus nombreuse et la plus pauvre" ; à cette fin, la réorganisation du système bancaire et du crédit doit permettre de débloquer les fonds nécessaires au développement industriel ; - les capacités individuelles doivent s'épanouir grâce à la généralisation de l'éducation ("A chacun selon ses capacités, à chaque capacité selon ses oeuvres") ; - forts de solides compétences d'ingénieurs (nombre d'entre eux étaient issus des rangs de Polytechnique et des Mines), ils élaborèrent des projets de nouvelles voies de communication (chemins de fer français, projet de percement de l'isthme de Suez). Bazard et Enfantin, intronisés "Pères suprêmes" de la religion saint-simonienne en 1829, s'opposèrent violemment sur la question de la place des femmes dans la société et se séparèrent en 1831. Après le schisme, Enfantin resta l'unique "Père" de la religion saint-simonienne. Il fut l'instigateur de l'épisode le plus connu du mouvement : son retrait avec quarante "fils" dans sa maison de Ménilmontant, assorti d'une prise d'habit, du respect du célibat et d'une rigoureuse discipline domestique (1832). Accusé de délit de réunion et d'outrages aux bonnes moeurs, Enfantin fut emprisonné en 1832. La Famille fut alors dispersée.
Après la période militante, sous la monarchie de Juillet et le Second Empire, les saint-simoniens s'employèrent dans le journalisme (Guéroult, Charton, Jourdan etc.), la banque (les Pereire), la politique (Carnot, Chevalier etc.), l'industrie et particulièrement les chemins de fer (Fournel, les Pereire, les Talabot, Enfantin etc.). Dissidents ou non, ils contribuèrent à développer en France une économie industrielle et de communication.
A sa mort en 1864, Enfantin a légué à la Bibliothèque de l'Arsenal les archives du mouvement et des papiers relatifs à ses propres activités, en Orient ou en France où il devint administrateur du P.L.M. Entrèrent ensuite à l'Arsenal le fonds D'Eichthal, les papiers Petit, divers objets et tableaux témoignant de l'épopée saint-simonienne. La collection est régulièrement enrichie et la Bibliothèque de l'Arsenal accueille aujourd'hui la Société des Etudes Saint-simoniennes (ex-Société des amis d'Ismaÿl Urbain et d'études saint-simoniennes).
Tous les manuscrits de ce fonds sont décrits dans le catalogueBnF archives et manuscrits. Un fichier des correspondances est aussi disponible sur place. Les ouvrages imprimés sont décrits dans le catalogue général de la BnF.
"La Bibliothèque de l'Arsenal", Arts et métiers du livre, 1997, n° 206, p. 52-53. Régnier, Philippe, "Histoire et nouveautés des fonds saint-simoniens de la Bibliothèque de l'Arsenal", Bulletin du bibliophile, 2000, n°2, p. 330-352.
Les textes fondateurs du saint-simonisme sont disponibles sur Gallica.