L’existence de la bibliothèque de Jean-Baptiste Colbert, à la fois instrument de travail de l’homme d’état et collection largement ouverte aux savants, est attestée dès 1659. Ses bibliothécaires sont Pierre de Carcavy puis l'érudit Étienne Baluze, qui joue un rôle déterminant dans sa constitution et sa gestion. En 1683, la bibliothèque passe au fils aîné de Colbert, Jean-Baptiste, marquis de Seignelay, qui continue l'œuvre de son père, puis au cadet, Jacques-Nicolas, archevêque de Rouen et enfin à leur neveu, Charles-Éléonor, comte de Seignelay. En avril 1728, ce dernier met en vente les 22.000 volumes entrés en sa possession. Les enchères durent six mois mais la vente est controversée et ne concerne finalement que les vélins et les livres imprimés, consistant en cadeaux, nouvelles parutions, achats faits en France et à l’étranger dans les librairies ou les ventes aux enchères, et même doubles de la Bibliothèque royale. Celle-ci n’en achète qu’un millier. De longues négociations évitent le même sort aux manuscrits, offerts en bloc au roi en 1732 moyennant le paiement de 300.000 livres. L’acquisition concerne les 6117 manuscrits anciens, dont 637 orientaux, 3582 latins, 877 grecs, des volumes en français, italien, espagnol…, plus 784 chartes originales et 1617 volumes de papiers modernes. Les dossiers de travail de Mazarin, dont Colbert a été l’exécuteur testamentaire, en constituent le noyau. A partir de 1664, s'y sont ajoutés les documents politiques ou administratifs copiés pour le ministre dans les dépôts d'archives. La bibliothèque a par la suite pris une dimension nouvelle avec l’arrivée de manuscrits originaux puis de textes anciens trouvés par les fonctionnaires royaux dans les institutions ecclésiastiques provinciales qui, en échange de compensations diverses, ont livré au ministre leurs fonds médiévaux. Des manuscrits ont été achetés en Orient, 800 volumes de haute époque réunis par Jacques-Auguste de Thou acquis en 1680. Parmi ces volumes, les belles reliures de maroquin rouge aux armes des Colbert sont nombreuses. A leur entrée dans la Bibliothèque royale, les papiers modernes sont répartis en quatre collections différentes, les fonds Languedoc-Doat, Flandre, Mélanges Colbert et Cinq Cents Colbert (voir à ces noms). Les dossiers de Mazarin quant à eux sont confiés aux Affaires étrangères. Les manuscrits anciens sont intégrés tant bien que mal dans le classement systématique instauré par Nicolas Clément en 1682: inscrits sous des cotes à exposants multiples, ils rendent totalement impraticable l’ancien inventaire et provoquent la recotation de tous les manuscrits en langues orientales, en grec et en latin de la Bibliothèque royale, suivie en 1739-1740 de la publication d’un catalogue imprimé en deux volumes. Le registre de prêts et les inventaires de la Colbertine sont conservés au Département des Manuscrits, de même que les archives de la gestion de Baluze (voir à ce nom). On peut aussi y consulter une concordance informatisée des cotes successives et des origines des manuscrits anciens, aujourd’hui tous intégrés dans les fonds par langues.
Bloch, Denise. "La bibliothèque de Colbert" Dans : Histoire des bibliothèques françaises, II, Les bibliothèques sous l'Ancien régime 1530-1789. Paris, 1988, p. 157-179 Colbert 1619-1683. Paris : Hôtel de la Monnaie, 1983 Collections de Louis XIV, dessins, albums, manuscrits. Paris : Grand Palais, 1977 Manuscrits, xylographes, estampages : les collections orientales du département des Manuscrits : guide / sous la direction d’Annie Berthier. – Paris : BnF, 2000, p. 9-10. Delisle, Léopold. Le Cabinet des Manuscrits de la Bibliothèque impériale. Paris, 1868, t. I, p.439-547
Léopold Delisle, Le Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque impériale [nationale] : étude sur la formation de ce dépôt, comprenant les éléments d’une histoire de la calligraphie, de la miniature, de la reliure et du commerce des livres à Paris avant l’invention de l’imprimerie, 1868-1881, t. I, p. 439-547. Inventaires mss et concordance informatisée à consulter au Dépt des Mss