Pellechet (Marie) [Réserve des livres rares, MSS]
Marie Pellechet (1840-1900), issue d’une famille aisée, connut une existence à la fois bourgeoise et traditionnelle (dévote, anti-dreyfusarde) et pionnière voire féministe dans plusieurs domaines (incunabuliste, photographe). Venue un peu par hasard aux joies et aux rigueurs de la bibliographie – pour aider un prêtre avec qui elle correspondait –, elle rédigea d’abord les Notes sur les livres liturgiques des diocèses d’Autun, Chalon et Mâcon (1883) qui établirent sa réputation. Elle conçut ensuite puis porta à bout de bras l’ambitieux projet du Catalogue général des incunables des bibliothèques publiques de France, qui fut même imprimé à ses frais, projet qui la mit au rang des meilleurs incunabulistes de son temps aux côtés de Robert Proctor ou de Konrad Haebler. Grâce à l’appui, parfois ambigu, de conservateurs de la Bibliothèque nationale comme Léopold Delisle ou Henri Omont, son plan – révolutionnaire pour l’époque – de catalogue collectif français des incunables fut approuvé par le ministère de l’Instruction publique en 1888. Le dépouillement des grandes bibliothèques parisiennes et provinciales, au prix de nombreux voyages, l’aide qu’elle trouva en se formant elle-même à la photographie, aboutirent à la parution du premier volume (1897), qui épuisa ses forces. La poursuite du catalogue par l’élève qu’elle s’était choisi, Marie-Louis Polain, permit encore la publication de deux volumes du Catalogue général des incunables (1905 et 1909), jusqu’à « Gregorius Magnus ».
Le manuscrit du catalogue, les fiches et les divers matériaux accumulés passèrent logiquement à M.-L. Polain, qui les augmenta considérablement, puis à sa mort (1933) les légua à Eugénie Droz, libraire suisse établie à Paris. En 1941, cette dernière parvint à ne pas communiquer ces manuscrits aux Allemands du Gesamtkatalog der Wiegendrucke, prétextant en faire établir une refonte succinte par Jacques Mégret, qui ne fut pas achevée. En 1947, E. Droz vendit une grande partie de la documentation au libraire new-yorkais H. P. Kraus qui en fit don en 1950 à la Bibliothèque nationale, tandis que d’autres documents furent directement donnés par E. Droz et que des photographies furent acquises auprès du libraire Picard. L’inventaire de ces papiers, répartis entre la Réserve des livres rares et les Manuscrits, a été publié par Ursula Baurmeister dans le Bulletin du bibliophile, 2004, p. 132-147.
De son vivant, Marie Pellechet fut généreuse avec les bibliothèques, multipliant les dons discrets (une trentaine d’incunables à la Bibliothèque nationale, d’autres à l’Arsenal, Sainte-Geneviève, Toulouse, le Musée Dobrée de Nantes), parfois en argent. Si sa bibliothèque personnelle fut léguée à Montpellier et ses appareils photographiques au Conservatoire national des Arts et Métiers, sa sœur, Catherine Pellechet († 1916), donna également quelques incunables à la Bibliothèque nationale.
Marie Pellechet, Catalogue général des incunables des bibliothèques publiques de France, reprint, t. 1, Nendeln, 1970 (introduction écrite pour la réimpression par Frederick R. Goff) ; Ursula Baurmeister, Lotte Hellinga, Hélène Richard, « Autour de Marie Pellechet », Bulletin du bibliophile, 2004, p. 89-164.
Payen, Jean-François (1800-1870) (Rés. Z.Payen)
Né à Paris le 24 juin 1800, le docteur Jean-François Payen se livra à des études scientifiques sur les eaux minérales et se spécialisa dans l’étude et le traitement de la maladie de la pierre ; il constitua une collection de 4000 ouvrages sur les eaux minérales (aujourd’hui dispersée ?). Mais la passion dominante de sa vie fut Montaigne. Il lui consacra plusieurs ouvrages, toujours tiRéserve des livres rares à petit nombre d’exemplaires, et surtout réunit une importante collection de livres de et sur Montaigne, dont une trentaine d’ouvrages annotés par Montaigne ou portant sa signature. Il accumula aussi des notes pour préparer une réédition des œuvres de Montaigne, qui n’aboutit pas. Après sa mort, le 7 février 1870, la Bibliothèque nationale acquit l’ensemble de sa collection montaigniste pour 31000 F. Ses filles firent don de ses manuscrits et notes de travail. La collection Payen fut aussitôt décrite sous forme d’un catalogue méthodique par Gabriel Richou, paru en 1878. Malgré la clause de l’acte de cession, qui prévoyait un cabinet spécial consacré à cette collection, elle fut répartie entre les départements de la BN. Les ouvrages imprimés et les notes de Payen sont aujourd’hui conservés à la Réserve des livres rares et constituent le Z. Payen, qui comprend 1440 numéros dans l’ordre du catalogue de Richou. Les autographes et les manuscrits de Montaigne sont conservés au département des Manuscrits (N. a. fr. 1068, 1466-1474) ; les portraits de Montaigne et les pièces topographiques au département des Estampes. Les pièces de la Xe section de l’inventaire (n° 1454-1467 : portraits à l’huile, statuettes, médailles) n’ont pas été retrouvées à ce jour.
Le Petit, Jules. Quelques mots sur le Dr J.-F. Payen, suivis d’un appendice donnant la nomenclature de ses travaux littéraires et scientifiques… Paris : G. Chamerot, 1873, XXXII p. Richou, Gabriel. Inventaire de la collection des ouvrages et documents réunis par J.-F. Payen et J.-B. Bastide sur Michel de Montagne… Paris : Léon Techener, 1878, XVII-397 p. (tient lieu de carnet pour le Rés. Z. Payen)
Lydia Mérigot, Les Catalogues du Département des imprimés, Paris : Bibliothèque nationale, 1974, p. 52. Les Catalogues imprimés de la Bibliothèque nationale : liste, description, contenu, Paris : Bibliothèque nationale, 1943, Impr. 58