Maison professe des Jésuites
Les Jésuites installèrent leur maison professe rue Saint-Antoine à Paris dans l’hôtel d’Anville, don du cardinal Charles de Bourdon en 1580. La bibliothèque du cardinal, reliée en maroquin, fut dispersée après l’interdiction des Jésuites en 1594. Lorsqu’ils réinvestirent les lieux au XVIIe siècle, ils acquirent un certain nombre de volumes pour constituer une bibliothèque. Elle fut enrichie par plusieurs grands dons, le principal étant celui de Pierre-Daniel Huet (1630-1721), évêque d’Avranches, membre de l’Académie française et bibliophile (voir Huet, Pierre-Daniel) en 1692. La même année, ils reçurent la bibliothèque du lexicographe Gilles Ménage (1613-1692), elle-même enrichie précédemment de la bibliothèque du philologue François Guyet (1575-1665). En 1739, le bibliothécaire de la maison professe, le père Tournemine, légua sa bibliothèque riche de 7 000 volumes. En 1754, la bibliothèque de la Maison professe comptait environ 30 000 volumes, ainsi que des manuscrits et quelques estampes. Elle n’était pas publique mais largement ouverte aux gens de lettres. La maison professe abritait également un cabinet d’antiquités, établi par le père Lachaise, et un cabinet de médailles, constitué par le Père Chamillard. En 1763, lorsque les Jésuites furent expulsés du royaume, l’abbé Baudot fut chargé de prendre les livres qui manquaient au roi. Le reste de la bibliothèque fut vendu aux enchères. Trois catalogues furent dressés à cette occasion : celui des imprimés qui comportait 7 252 numéros, celui des manuscrits et celui des médailles antiques et autres curiosités. La bibliothèque de Huet fut épargnée car il avait prévu dans sa donation que celle-ci serait annulée si sa bibliothèque devait être dispersée quelle qu’en soit la cause. Les livres furent restitués à son neveu et héritier, M. de Charsigné, qui, ne sachant où les stocker, les confia en dépôt au bibliothécaire du roi, puis en fit don à la bibliothèque royale. A la Révolution, le dépôt littéraire Saint-Louis-La-Culture fut installé sur le site de l’ancienne maison professe des Jésuites. Les Jésuites de la Maison professe n’avaient pas d’estampille. On rencontre parfois la mention manuscrite : Domus profess. Paris. Societ. Jesu. Leur marque reproduisant le monogramme de la société est assez rare (IHS).
Sources
- Catalogue des livres de la bibliothèque de la maison professe des ci-devant soi-disant jésuites, Paris, Pissot, 1763. - Catalogus manuscriptorum codicum Collegii Claromontani, quem excipit catalogus mssrum domus professae Parisiensis autoribus Dom F. Clément et L.-G. Oudart Feudrix de Bréquigny, Paris : Saugrain, 1764. - Catalogue des médailles antiques, modernes et autres curiosités de la bibliothèque de la maison professe de la rue Saint Antoine... [Vente le lendemain de la fête de saint Louis.], Paris : Simon, 1763.
Bibliographie - Franklin, Alfred. Les anciennes bibliothèques de Paris : églises, monastères, collèges, etc. Paris : Imprimerie impériale, 1867-1873, 3 vol. - Pélisson-Karro, Françoise. « La bibliothèque de Pierre-Daniel Huet, évêque d'Avranches, entre la maison professe des jésuites et la Bibliothèque du Roi ». Dans : Mélanges autour de l'histoire des livres imprimés et périodiques, Paris : BnF, 1998, p. 107-130.
François Lesure, « The Music department of the Bibliothèque nationale », Notes / Music library association, 1978, p. 251-268.
Philosophe, introducteur de Descartes en Angleterre, alchimiste, voyageur, collectionneur de livres, Kenelm Digby figure parmi les personnalités ayant servi de trait d’union entre les deux côtés de la Manche à une époque troublée. C’est du reste lors de l’un de ses séjours forcés à Paris qu’il constitua une riche bibliothèque de livres imprimés, qu’il fit relier pour la plupart de maroquin aux armes et au chiffre KD ou KDV, associant le nom du chevalier à celui de sa femme Venetia Stanley, disparue dès 1633. Après 1665, le sort de sa bibliothèque, réunissant manuscrits et imprimés, est obscur ; toujours est-il qu’après deux ventes successives, l’une à Paris vers 1665, l’autre à Londres en 1680, une partie alla constituer le fonds Digby de la Bodléienne, tandis que des "épaves" demeurèrent en France. Émile Chatelain a dressé la liste exhaustive des 27 livres de cette provenance figurant aujourd’hui dans les collections de l’Université de Paris. De son côté, Léopold Delisle a établi, outre une description approfondie de 2 des 4 manuscrits de cette collection se trouvant au Département des manuscrits, un inventaire de 53 volumes imprimés conservés à la Réserve des livres rares. À ce nombre, on pourrait ajouter les titres figurant dans le fichier des provenances de la Réserve des livres rares et omis par cet inventaire, les ouvrages faisant partie de l’accroissement Réserve des livres rares, et d’autre part plusieurs ouvrages compris dans les fonds généraux, sous Delisle comme aujourd’hui, dont la mention de provenance n’est pas toujours signalée par les catalogues. Au total, plus de 110 ouvrages ayant appartenu à K. Digby figurent aujourd’hui dans les collections de la Bibliothèque. Ce sont pour la plupart des livres à caractère religieux ou philosophique des XVe, XVIe et XVIIe siècles, du plus grand intérêt, qui semblent être arrivés dans les collections consécutivement à des confiscations révolutionnaires qui les ont fait transiter par des dépôts littéraires : beaucoup en particulier semblent avoir appartenu à la communauté des Incurables.
Catalogue de livres [de K. Digby], Paris, [vers 1665] Bibliotheca Digbeiana, sive catalogus librorum …quos post Kenelmum Digbeium…possedit… Georgius Comes Bristol, Londoni, 1680 Émile Chatelain, "Quelques épaves de la Bibliothèque de Kenelm Digby". Revue des bibliothèques, 1891, p. 77-80 et 1893, p. 11-15 Léopold Delisle, Sir Kenelm Digby et les anciens rapports des bibliothèques françaises avec la Grande-Bretagne. Paris : Plon, Nourrit et Cie, 1892