Léopold Delisle, Le Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque impériale [nationale] : étude sur la formation de ce dépôt, comprenant les éléments d’une histoire de la calligraphie, de la miniature, de la reliure et du commerce des livres à Paris avant l’invention de l’imprimerie, 1868-1881, t. I, p. 412. Henri Omont, Concordances des numéros anciens et des numéros actuels des manuscrits latins de la Bibliothèque nationale, précédées d’une notice sur les anciens catalogues, Paris : E. Leroux, 1903, p. 144-145. Werner Paravicini, Die Nationalbibliothek in Paris : ein Führer zu den Beständen aus dem Mittelalter und der frühen Neuzeit, München ; New York ; Paris [etc.] : K.G. Saur, 1981, p. 81.
La bibliothèque Rothschild au département des Manuscrits de la BnF
Riche de 9149 ouvrages précieux – dont des manuscrits - , la bibliothèque de James et Henri de Rothschild demeure une collection emblématique des pratiques bibliophiliques du dernier tiers du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle. James de Rothschild (1844-1881) aurait commencé dès son adolescence à fréquenter les librairies d’ancien. Dès 1863 il apparut sur le marché des enchères. Et très tôt se manifestèrent ses caractéristiques : un goût prononcé pour les éditions anciennes des XVe et XVIe siècles, ainsi que pour les éditions du théâtre classique ; la décision de n’acquérir que des exemplaires de choix. Le don d’une cinquantaine d’ouvrages par son grand-père maternel le baron James (fondateur de la branche française des Rothschild) – ouvrages reçus lors de la mort de celui-ci en 1868– enrichit sa bibliothèque dans la proportion d’un tiers environ et surtout la dota de quelques-uns de ses joyaux : livres d’heures imprimés du XVe siècle ou du tout début du XVIe, livres illustrés du XVIIIe, enfin le recueil de près de 500 pièces de dessins de costumes et de décors de théâtre provenant des archives de Papillon de La Ferté, sans compter les dessins originaux de Boucher pour les œuvres de Molière.
Même si James ne semble pas s’être enthousiasmé pour les livres à gravures, l’héritage de son grand-père donna un nouvel élan à sa passion bibliophilique. James agrandit son réseau de libraires, continua à suivre les ventes publiques et sollicita directement certains confrères pour s’assurer la possession de pièces importantes. La guerre de 1870, divers événements intervenus dans sa vie, ralentirent son activité pendant quelques années : elle reprit de plus belle à partir de 1873. Fidèle aux choix de ses débuts, James poursuivit sa quête de pièces des XVe et XVIe siècles (un domaine qui représentait facilement la moitié de ses acquisitions annuelles), particulièrement de rarissimes plaquettes, parfois anonymes, poétiques ou non, témoins éphémères d’événements solennels ou anecdotiques. De tels documents n’avaient pas seulement un intérêt bibliophilique à ses yeux : ils servaient aussi la recherche. James lui-même, grâce à sa collection et au savoir acquis, collaborait en effet au Recueil de poésies françoises initié par Montaiglon.
L’érudition le guidait également dans la réunion d’ouvrages du XVIIe s. : par exemple, pour chaque auteur dramatique auquel il s’intéressait, il réunissait un exemplaire de chacune des éditions de ses textes, un exemplaire des différentes œuvres complètes, enfin les textes de l’époque réagissant aux œuvres. De même, il entreprit, pour les sauver et les étudier, de copier et d’acheter les notes manuscrites et imprimées de Loret et de ses successeurs. Cela n’empêchait pas James de rechercher aussi des ouvrages tenant leur valeur d’une illustre provenance ou d’une riche reliure (les livres de comte d’Hoym réunissaient ces deux conditions). Quand des ouvrages lui parvenaient dépourvus de reliure, James les confiait aux mains expertes de Trautz-Bauzonnet dont il appréciait particulièrement les méthodes et le talent (au point de racheter son atelier au décès du relieur – atelier dont les fers à dorer furent ensuite offerts par Henri de Rothschild à la BnF). A sa mort en 1881, James de Rothschild laissait une collection riche de 2423 pièces. Sa veuve, puis surtout son fils Henri continuèrent à l’enrichir, en suivant les mêmes directions qui avaient présidé à sa constitution et en mettant l’accent sur les manuscrits médiévaux. Ils l’augmentèrent de 6726 pièces, portant l’ensemble à 9149 pièces. Henri, à sa mort en 1947, légua la bibliothèque au département des Manuscrits.
La collection est décrite pour une part dans le catalogue Picot (5 volumes qui reprennent l’intégralité des acquisitions de James et une part de celles de sa veuve et de Henri), pour une autre part dans le catalogue général sous la cote supplément Rothschild. Elle est consultable, sur autorisation du directeur du département des Manuscrits, à la table de la réserve de la salle de lecture du département.
La collection Émile Senart appartient au fonds « Sanscrit » du département des Manuscrits. Elle compte environ trois cents manuscrits, rédigés principalement sur papier indien entre le XVe et le XIXe siècle. Les manuscrits portent les cotes « Sanscrit 1444 » à « Sanscrit 1748 ». La particularité principale de la collection est de rassembler en grande partie des textes d’obédience jaina copiés en Inde occidentale (Gujarat, Rajasthan). On relève aussi une trentaine de textes brahmaniques et une dizaine de textes bouddhiques. Tous les champs du savoir abordés par la littérature jaina sont bien représentés, que ce soit par des textes doctrinaux, philosophiques, narratifs ou scientifiques. La collection fut « transmise par fractions » (selon les termes du registre des dons) au département des Manuscrits entre les années 1930 et 1937 par l’Institut de Civilisation Indienne où elle était d’abord conservée. Émile Senart (1847-1928) constitua cette collection par l’entremise de son disciple Alfred Foucher (1865-1952) qui avait établi des contacts en Inde lors d’une expédition scientifique avec deux fournisseurs indiens, Gauri Shankar (?-?) et Bhagavandâs Kevaldâs (1850-1900). Ce dernier, un jaina originaire du Gujarat, était particulièrement actif dans les moissons de manuscrits recherchés par les savants occidentaux pour leurs propres recherches ou pour constituer les fonds des bibliothèques en Europe.
Filliozat, Jean. « État des manuscrits de la collection Émile Senart », Journal Asiatique, janvier-mars 1936, p. 127-143.
Balbir, Nalini. « Un manuscrit illustré du Kalpasûtra jaina conservé à la Bibliothèque Nationale (Cote : Sanscrit 1453) », Bulletin d’Études Indiennes, n° 2, 1984, p. 17-39.
Petit, Jérôme ; Balbir, Nalini. « La collection Émile Senart et la découverte d’un manuscrit jaina illustré (Bibliothèque nationale de France, Sanscrit 1622) », Bulletin d’Études Indiennes, n° 24-25, 2006-2007, p. 177-190.
Collection Charles Schefer
La collection de manuscrits arabes, persans et turcs de Charles Schefer entra à la Bibliothèque le 27 décembre 1899, par l'intermédiaire de sa veuve. Charles-Henri-Auguste Schefer (Paris 16 novembre 1820-Paris 3 mars 1898), secrétaire-interprète pour les langues orientales au Ministère des Affaires étrangères, accomplit de nombreux voyages au Proche-Orient. Il fut nommé en 1857 professeur de persan à l'Ecole des Langues orientales ; devenu administrateur, il occupa cette charge pendant trente deux ans, réorganisant l'école et fondant la bibliothèque. Parallèlement, il réunit à partir de1886, au château de la Croix-Saint-Alban près de Chambéry, une importante collection personnelle d'objets et d'ouvrages orientaux qu'il avait rapportés de ses voyages. Entre autres, comme témoignage de l'estime dans laquelle il le tenait, le sultan Abd el-Medjid avait offert à Ch. Schefer de choisir quelques manuscrits dans sa bibliothèque du Sérail à Istanbul ; Ch. Schefer n'osa pas prendre les plus merveilleux, mais il rapporta cependant quelques ouvrages non sans intérêt. Dans une correspondance, il dit souhaiter léguer ses manuscrits à la Bibliothèque nationale, mais il s'agira en définitive d'une vente après sa mort. Grâce à l'intervention de Léopold Delisle, un décret du 27 décembre 1899 autorisa une dépense de 100000 francs et rendit possible l'acquisition des quelque huit cents manuscrits qui composaient l'ensemble ; ce fut l'un des plus importants accroissements qu'aient reçus les fonds orientaux de la Bibliothèque depuis longtemps. Sa collection se compose de 274 manuscrits arabes (soit 406 ouvrages) cotés Arabe 5816 à 6090 ; 275 manuscrits persans (soit 404 ouvrages), cotés Supplément persan 1303 à 1578 ; 237 manuscrits turcs (soit 350 ouvrages), cotés Supplément turc 957 à 1194. Le catalogue particulier en fut publié dès 1900 par Edgar Blochet ; par la suite, des notices plus développées furent intégrées dans les catalogues respectifs des fonds arabe, persan et turc.
• BLOCHET (Edgar), Catalogue de la collection de manuscrits orientaux, arabes, persans et turcs, formée par M. Charles Schefer..., Paris, E. Leroux, 1900. • BLOCHET (Edgar), Catalogue des manuscrits arabes des nouvelles acquisitions : 1884-1924, Paris, 1925. • BLOCHET (Edgar), Catalogue des manuscrits persans de la Bibliothèque nationale, Paris, Imprimerie nationale, E. Leroux, 1905-1934. 4 vol. • BLOCHET (Edgar), Catalogue des manuscrits turcs, Paris, Bibliothèque nationale, 1932-1933. 2 vol. • Livre du Bicentenaire. Deux siècles d'histoire de l'École des langues orientales(1795-1995), Paris,1995, 477 p., sous la direction de Pierre Labrousse.
Les Catalogues imprimés de la Bibliothèque nationale : liste, description, contenu, Paris : Bibliothèque nationale, 1943, Mss 13