Werner Paravicini, Die Nationalbibliothek in Paris : ein Führer zu den Beständen aus dem Mittelalter und der frühen Neuzeit, München ; New York ; Paris [etc.] : K.G. Saur, 1981, p. 78-79. Deux répertoires : Mss Bureau 58 (10) Correspondance des bénédictins Dom D’Achery, Dom Montfaucon et autres (Français 17678-17713) Mss Bureau 58 (11) Correspondance des bénédictins Dom Mabillon et autres (Français 19639-19681)
Collection PITOEFF
Georges PITOEFF (1884-1939), acteur, décorateur, metteur en scène, directeur de troupe, traducteur, est aussi l’un des membres fondateurs du Cartel.
C’est en Russie et plus précisément à Tbilissi où son père dirige un théâtre, que Georges Pitoëff, dès son plus jeune âge, découvre sa vocation. En 1902, à Moscou, au cours de ses études universitaires, il suit une formation d’architecte, il fréquente assidûment le théâtre d’Art de Stanislavski. Il suit son père à Paris, en 1905, et joue en amateur au « Cercle des Artistes russes ». Il débute comme comédien en 1908, à St Petersbourg, au Théâtre dramatique Véra Komissarjevskaïa, où il rencontre des poètes symbolistes mais aussi des metteurs en scène comme Evreïnov, Taïrov, Meyerhold. En 1910 à la fois acteur et régisseur du Théâtre mobile de Gaïdebourov, il parcourt la Russie. Il revient en 1913 à St Petersbourg, pour prendre la direction de « Notre Théâtre », théâtre d’un quartier ouvrier. Là il met en scène, un répertoire européen : Ibsen, Shaw, Wilde.. et pratique un théâtre à l’opposé du réalisme de Stanislavski. Il participe activement à la réflexion qui accompagne, en Russie, la naissance de nouvelles formes théâtrales, et cette expérience éclaire la place originale qu’il tient en France plus tard, au sein du Cartel (L. Jouvet, G. Baty, C. Dullin) par son immense répertoire, très tourné vers la création contemporaine, et par son œuvre de très inventif décorateur.
En 1914 il quitte la Russie pour Paris, découvre les expériences théâtrales de Jacques Copeau. épouse un an après , sa compatriote, Ludmilla de Smanov (1895-1951), elle l’accompagne tout au long de son parcours qui le mène de Genève (1915- 1922) où il crée sa compagnie, à Paris où ils se fixent en 1922 : d’abord à la Comédie des Champs-Elysées, puis de théâtres en théâtres : Théâtre des Arts, Vieux-Colombier, Champs-Elysées avant de s’installer au Théâtre des Mathurins en 1934.. Ludmilla a fait ses débuts de comédienne à Genève, en 1915 dans les Tréteaux de Blok. Elle fera désormais partie de toutes les distributions du répertoire de son mari, et sera un atout essentiel de la Compagnie Pitoëff. Sa voix pure et son jeu passionné lui ont permis des affinités exceptionnelles avec les héroïnes de Tchekhov, Claudel, Ibsen, et Shaw : le rôle titre, Sainte Jeanne, la consacrera comme l’une des plus grandes comédiennes parisiennes de l’entre-deux guerres.
Georges Pitoëff meurt à Genève en 1939. Metteur en scène Georges Pitoëff va s’attacher à faire connaître le plus grand nombre d’auteurs possibles sans se soucier de la critique (212 pièces mises en scène de 115 auteurs appartenant à 21 nationalités, il révèle Tchekhov en France grâce aux traductions qu’il en fait avec l’aide de Ludmilla), ce qui explique les imperfections de certaines réalisations et les difficultés matérielles qu’il connaît : « le théâtre ne peut pas vivre sans essai… ». Son travail se caractérise par une spiritualité profonde de l’inspiration alliée à une imagination puissante. Pour lui le jeu de l’acteur est primordial, c’est à partir de ce jeu que le metteur en scène « autocrate absolu », mais imprégné de l’esprit et du message de la pièce, transpose et dépasse la vie. A l’originalité de ce répertoire s’ajoute celle du décorateur de talent qu’il se révèle être. L’esthétique de ses maquettes (formes géométriques, extrême dépouillement décoratif) illustre le courant pictural russe représenté par Kandinsky, Larionov…
A la scène il choisit tantôt de libérer l’espace (simples rideaux, peu d’accessoires) ou de l’occuper dans toutes ses dimensions (décors à compartiments, simultanés…), ses dispositifs scéniques pour les drames shakespeariens sont une réussite. Le comédien ne laisse pas indifférent, il marque de son sceau le rôle d’Hamlet et s’essaie dans des personnages apparemment antithétiques avec plus ou moins de bonheur. Son physique tourmenté, illuminé d’un feu intérieur le pousse au jeu expressionniste dans l’interprétation des héros torturés et névrosés de Pirandello ou Tolstoï. Son amour ardent du théâtre, qu’il manifeste dans les multiples responsabilités qu’il assume, le plonge dans des difficultés financières à répétition ( surtout à partir de 1934 au Théâtre des Mathurins) auxquelles il doit remédier en tant que directeur de troupe. Il se montre un administrateur inventif (recours au mécénat en Suisse) et avisé (tournées à l’étranger très lucratives). Dès 1937, en accord avec les membres du Cartel et leur conception du théâtre, il souhaite une aide de l’état. Seul du Cartel, à ne pas connaître la consécration par une nomination à la tête de la Comédie-Française,( sans doute victime de son origine étrangère, de son répertoire cosmopolite et de l’inquiétude inspirée à ses pairs) il marque profondément l’histoire du théâtre par sa personnalité hors du commun et cette symbiose quasi mystique avec sa femme, collaboratrice et inspiratrice sur laquelle s’appuie tout son travail de mise en scène.
En 1959, une partie du fonds Pitoëff, soit 250 esquisses et maquettes de décors ( souvent de la main de G. Pitoëff), et quelques photographies de scène ; entre par achat dans le Département, elle sera complété ultérieurement par un don de Madame Goldschild, en 1982, après la mort de son mari, Maurice Goldschild collaborateur jusqu’en 1939 de Georges et Ludmilla Pitoëff. A l’occasion de la grande exposition que le Département des Arts du spectacle a consacrée aux metteurs en scène du Cartel, le fils de Georges Pitoëff, offre en 1987 une importante correspondance et quelques textes annotés par son père. En 1990 et 1991 le département fait deux achats successifs auprès de Sacha Pitoëff, puis après la mort de ce dernier, auprès de son frère Georges et des autres héritiers, il s’agit, de textes portant des annotations de mises en scène. De 1994 à1996, des achats complémentaires seront effectués portant sur -deux textes annotés de Pirandello, Six personnages en quête d’auteur, et d'Ibsen, Le Petit Eyolf ; - le manuscrit de sa traduction de La Cerisaie - deux tableaux : un portrait au fusain de Georges Pitoëff et une sanguine représentant Ludmilla Pitoëff - une maquette de décor pour Là-bas. La documentation : programmes, presse, textes annotés, photos, concernant les spectacles montés par Georges Pitoëff et joués par sa compagnie, a été cataloguée dans la base BNF Opaline accessible par internet.
Picot, Émile (1844-1918) (Z. Picot) Licencié en droit en 1865, Émile Picot poursuit de 1866 à 1872 une activité diplomatique en Pays Roumains, d’abord comme secrétaire du prince Carol de Roumanie (1866-1867), puis comme vice-consul de France à Timisoara. Ses notes diplomatiques concernant les principautés roumaines se trouvent aux Archives du Ministère des Affaires étrangères. Dans toute cette période son intérêt se porte aussi vers les pays des Balkans et de l’Europe centrale. Comme il apprend la langue roumaine, de retour en France, il crée à l’École des langues orientales vivantes la chaire de roumain en 1875, où il va enseigner jusqu’en 1909. Parallèlement à son activité pédagogique, Émile Picot se consacre à l’étude de la langue et de la littérature françaises au Moyen Age et à la Renaissance. De ce travail, bien des études, des éditions de vieux textes et des bibliographies savantes sont publiées. La Bibliographie cornélienne (1876), le monumental catalogue des livres de la bibliothèque de James de Rothschild (1884-1920) ou Les Français italianisants au XVIe siècle (1906-1907) restent de nos jours une source très riche en renseignements pour l’histoire littéraire des XVe et XVIe siècles. Un des fondateurs de la Société des Anciens Textes Français (dès 1874), il est aussi membre honoraire de l’Académie roumaine (1879), de l’Académie royale de Serbie (1893) et de l’Académie des Sciences, Lettres et Arts de Padoue (1903) ; membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (1897), de la Société des Bibliophiles français (dès 1898, élu président en 1916), de la section d'histoire et de philologie du Comité des Travaux historiques et scientifiques (dès 1900, élu vice-président en 1917), du conseil de la Société de l’Histoire de Paris et de l’Ile de France (dès 1903, président 1909-1910). Linguiste, philologue, folkloriste, historien et bibliographe, Émile Picot organise sa bibliothèque autour de ses points d’intérêt. Il lègue à la Bibliothèque nationale un répertoire de 250.000 fiches bio-bibliographiques (département des manuscrits) et un fonds de publications étrangères aujourd’hui conservé au département littérature et art, sous la cote Z Picot 1-1403, 3001-3023. Sauf exceptions, la Bibliothèque nationale n’a retenu que les ouvrages qui n’existaient pas dans ses collections. Des dons ont été aussi faits par Picot à l’École des langues orientales, et à la Sorbonne. Les formalités du legs ont été réglées de son vivant, en plusieurs tranches, dès 1910, donc après son départ à la retraite. Le "Z-Picot" forme un ensemble d’œuvres linguistiques, littéraires et historiques des pays des Balkans, de l’Europe centrale et orientale. Les livres roumains ou concernant les Roumains occupent une place prépondérante et comprennent un grand nombre d’envois autographes de la part des auteurs ; la vie culturelle, politique, économique et sociale de l’époque est ainsi remarquablement restituée. En outre, des titres italiens liés à la dialectologie et au folklore soulignent son intérêt particulier pour ces domaines. Tous les ouvrages, à quelques exceptions près, portent à la couverture, au titre ou à la première page, sa signature autographe à l’encre : "Emile Picot"
Paulmy
Neveu du comte d’Argenson, ministre de la guerre, c’est à son oncle que Antoine-René de Voyer d’Argenson, marquis de Paulmy (1722-1787) dut de bénéficier d’un logement dans le bâtiment de l’Arsenal où il s’installa en 1757. C’est aussi sous sa direction qu’il fit ses premiers pas dans le domaine de la bibliophilie, rassemblant une collection qui en 1785 ne comprenait pas moins de 52 000 volumes, dont 2412 manuscrits, 592 portefeuilles d’estampes ainsi qu’une collection de médailles et de livres de musique.
Après plusieurs ambassades en Suisse, en Pologne et à Venise, Paulmy met un terme à sa carrière diplomatique en 1768 et se retire définitivement à l’Arsenal. Il fréquente les milieux érudits, se passionne pour la littérature médiévale et se consacre à l’enrichissement de sa bibliothèque. Celle-ci a pour noyau la bibliothèque de son oncle, riche de plus de 14 000 ouvrages, dont les « manuscrits de Bourgogne » constituent le fleuron. La collection s’accroît par des achats effectués auprès des libraires de toute l’Europe , par des acquisitions dans les ventes aux enchères, voire par l’achat de bibliothèques entières, telle la seconde partie de la vente La Vallière, acquise en bloc en 1786. La littérature, l’histoire et les sciences y tiennent une place de choix, tandis que la théologie et la jurisprudence y sont moins bien représentées.
Cette immense collection sert de vivier à plusieurs entreprises éditoriales, telles la Bibliothèque universelle des romans ou les Mélanges tirés d’une grande bibliothèque, destinés à un large public mais elle permet également au collectionneur de satisfaire son goût pour l’érudition. Les notes dont Paulmy surcharge les feuillets de garde de ses ouvrages ou les marges de son catalogue manuscrit témoignent de son intérêt pour l’histoire ou la bibliographie, mais elles peuvent également donner de précieux témoignages sur le succès d’un ouvrage récemment paru ou la réputation d’un auteur contemporain.
Contrairement au duc de La Vallière, le marquis de Paulmy ne se sépara que rarement de certains de ses ouvrages. La crainte de voir sa bibliothèque dispersée après sa mort le poussa à offrir sa collection à Louis XVI, à la seule condition de remplacer Jean-Frédéric Bignon, bibliothécaire du roi, mort le 1er avril 1784. Cette proposition fut refusée et le 20 juin 1785, Paulmy vendit sa bibliothèque au comte d’Artois, moyennant 412 000 livres et l’assurance de conserver la jouissance de sa collection jusqu’à sa mort.