Fonds Romain Rolland au Département de la musique
Romain Rolland (1866-1944) a été très tôt un mélomane averti et un bon pianiste. C’est sous la pression de ses parents qu’il renonce à l’idée d’entreprendre une carrière musicale, prépare et réussit le concours de l’Ecole Normale. Il n’abandonne cependant pas la musique, puisqu’il consacre une de ses thèses aux Origines du théâtre lyrique moderne : l'histoire de l'opéra avant Lulli et Scarlatti (1895), et devient finalement le premier titulaire de la chaire d’histoire de la musique à la Sorbonne. Moins connue du grand public que son engagement intellectuel et que son œuvre littéraire, son activité musicologique n’a jamais cessé, même après sa retraite en 1911. A partir de 1928, il écrit en effet une vaste étude sur Beethoven, en 7 volumes (publiée de 1929 à 1949), et continue à entretenir une abondante correspondance avec des musicologues et des compositeurs, comme Henry Prunières, Paul Dupin ou Ernest Bloch.
La bibliothèque musicale de Romain Rolland est le reflet de ces liens avec la musique. La plupart des volumes sont des éditions contemporaines datant de la fin du XIXe et du début du XX e siècle, mais Romain Rolland possédait également quelques autographes musicaux (Bach, Berlioz, Mozart), et une quarantaine de partitions du XVIIIe siècle, dont il aimait particulièrement la musique. Bien entendu, les goûts musicaux de Romain Rolland, bien connus par ailleurs au travers de sa production littéraire et musicologique, apparaissent nettement, et l’on ne sera pas surpris de trouver dans cette bibliothèque plus d’œuvres de Beethoven, de Haendel et Richard Strauss, que de Verdi ou de Rossini. De nombreux volumes comportent des ex-libris et des annotations. On trouve dans ce groupe les premières partitions que Romain Rolland a pu posséder, datant de ses années de lycée ou d’Ecole Normale : adolescent et jeune homme, il aimait à y inscrire non seulement son nom, mais aussi des détails sur le moment où il avait entendu l’œuvre en concert, et de brefs commentaires. Certaines sont des étrennes offertes par ses parents, le fait étant alors dûment consigné sur l'une des pages de garde. Cette partie du fonds est la plus détériorée, car elle a probablement été la plus manipulée, lors d’exécutions au piano, ou de lectures suivies en concert. C’est le cas par exemple de la partition des Ruines d’Athènes de Beethoven, œuvre dont la découverte a correspondu, selon les termes mêmes de Romain Rolland dans son journal, à une crise spirituelle. Dans le même ordre, certaines partitions, soigneusement reliées aux initiales RCR, gardent le souvenir de soirées musicales passées en compagnie de sa femme Clotilde Bréal, dont il devait divorcer en 1901. Très souvent également, Romain Rolland écrit dans les marges de ses partitions de courtes analyses musicologiques, et effectue des rapprochements entre œuvres musicales. Ces annotations marginales ne sont pas seulement un élément de la préparation de ses cours de professeur d’histoire de la musique, elles sont présentes dès les partitions de jeunesse et témoignent de son intérêt profond pour les œuvres.
Enfin, le fonds comporte quelques rares partitions portant en timbre sec l’ex-libris du père Romain Rolland, Emile Rolland et celui de sa sœur, Madeleine Rolland. Sa notoriété allant croissant, des compositeurs et des éditeurs adressent spontanément leurs œuvres à Romain Rolland dès leur parution, accompagnées ou non d’une dédicace. Certains grands ensembles de partitions d’auteurs contemporains, témoignent de relations proches, dont on trouve l’écho dans les correspondances : c’est le cas notamment des partitions de Lucien et Mary Haudebert et d’Ernest Bloch. La bibliothèque musicale de Romain Rolland conservée au département de la Musique comprend 1250 volumes de musique imprimée principalement, cotés dans le fonds général et en cours de catalogage dans BN-Opaline. Elle comporte aussi un ensemble de partitions musicales russes, et quatre boîtes de copies manuscrites de partitions anciennes, la plupart effectuées par Romain Rolland ou son épouse Clotilde pour sa thèse sur l’opéra italien. Le département de la musique conserve en outre des exemplaires de livres de Romain Rolland sur la musique, catalogués dans BN-Opale Plus.
Fonds Delphine Seyrig (1932-1990)
Delphine Seyrig © BnF
Elève de Pierre Bertin, Tania Balachova et Roger Blin, Delphine Seyrig débute en 1952 au centre dramatique de l'Est avec Michel St Denis, puis rejoint Jean Dasté à la Comédie de St Etienne. Ces choix montrent son exigence et son engagement.
De 1956 à 1959 elle vit aux Etats-Unis, suit en 1958 les cours de Lee Strasberg au fameux Actor's studio de New-York. A son retour en France elle interprète Musil, Tchekhov, Pirandello, Tourgueniev mais surtout des auteurs contemporains : Pinter, James Saunders, Jean-Claude Carrière, Arrabal, Peter Handke, Rainer Werner Fassbinder. Le Film de Resnais et Robbe-Grillet "L'année dernière à Marienbad" la révèle au grand public en 1961.
On la retrouve dans "Muriel" de Resnais, "La Musica", " India Song" et "Son nom de Venise dans Calcutta désert" de Duras ; avec Truffaut elle tourne en 1968 "Baisers volés", avec Buñuel "la Voie Lactée"et "Le Charme discret de la bourgeoisie". Elle travaillera aussi avec Losey, Stanojevic, Zinnemann, Don Siegel, J. Demy, J. Savary. Féministe engagée (elle signe le Manifeste des 243) elle collabore avec des réalisatrices, outre Duras, Chantal Ackerman, Marta Metzaros, Patricia Moraz, Liliane de Kermadec, Ulrike Ottinger, Pomme Meffre, et donne son impulsion au premier Festival de Films de femmes en 1975, à Paris. Ce festival en entraîne d'autres en France (et notamment à Créteil ) mais aussi à l'étranger. Delphine Seyrig est partie prenante du Film collectif "Maso et Miso vont en bateau", et participe activement à la création du Centre audiovisuel Simone de Beauvoir en 1982. Ce centre a pour mission de conserver et promouvoir les videos de films de femmes. Par cette démarche la comédienne rend un vibrant hommage à celle dont elle avait fait son modèle et avait illustré tout au long de sa vie les engagements politiques et philosophiques : "j'ai épousé tout ce qui me semblait injuste, réprimé". Elle rencontre le Mouvement des femmes dès 1970.
C'est l'une des actrices françaises qui a marqué par son talent et sa personnalité le théâtre et le cinéma des années 60 à 90.
Le Département reçoit en 2002 grâce à son fils Duncan Yungerman, l'ensemble des documents de production retraçant toute sa carrière : programmes, photographies, affiches, presse, interviews, hommages divers. Ce fonds est accessible par un inventaire (cote du fonds 4 COL 73) mis en ligne dans le catalogue BnF Archives et manuscrits : http://archivesetmanuscrits.bnf.fr/ark:/12148/cc103416g.
Les catalogues des documents conservés au Département donnent également accès à toutes les facettes de cette interprète hors du commun.
La Société de Géographie est créée à Paris à l’issue d’une réunion tenue le 19 juillet 1821 et tient sa première assemblée générale à l’Hôtel de ville de Paris, sous la pRéserve des livres raresidence de Jean-Denis Barbié du Bocage le 15 décembre de la même année. De par sa vocation universelle mais également par le fait qu’elle est la première société de géographie créée au monde, elle ne porte pas de nom particulier. Son objectif est de concourir aux progrès de la géographie, d’encourager les études et les découvertes géographiques et de faire entreprendre des voyages dans des contrées inconnues. Parmi les membres fondateurs on trouve Edme François Jomard créateur du Dépôt des Cartes et Plans à la Bibliothèque royale en 1828. Dès 1822 la Commission centrale décide de décerner des prix destinés à récompenser des explorateurs ou des savants ayant contribué à faire progresser la connaissance de la terre. Cinquante prix seront créés dans des domaines très variés pour travaux géographiques ou voyages de découverte. Afin de donner une direction méthodique aux travaux d’exploration, la Société de Géographie rédige et publie tout au long du siècle des questions et instructions aux voyageurs. Dans le Bulletin de la Société de Géographie qui paraît depuis 1822 sont consignés les relations de voyages des explorateurs accompagnées de cartes mais également les comptes-rendus de l’activité de la Société. La Société de Géographie patronne de nombreuses expéditions et voyages de découverte et contribue même parfois à leur financement, comme dans le cas de la mission Foureau-Lamy. Au tournant du siècle, elle est un des acteurs principaux de l’expansion coloniale française. Depuis 1873, elle favorise l’émergence de sociétés de géographie en province et participe activement à des congrès géographiques. Elle organise la deuxième session du Congrès international de géographie à Paris en août 1875 puis la quatrième à l’occasion de l’Exposition universelle de 1889. Avec d’autres institutions, elle est à l’origine de la création du Comité National Français de Géographie en 1920, rattaché à l’Union Géographique Internationale dont le premier président fut le prince Roland Bonaparte lui même président de la Société de Géographie (1909-1924).
Dès l’origine la Société de Géographie prévoit de constituer une bibliothèque ouverte aux membres de la Société de Géographie mais sans réels moyens financiers. Des revues géographiques du monde entier sont reçues en échange du bulletin mais les principaux enrichissements proviennent des dons de ses membres et correspondants français ou étrangers : militaires, diplomates, ingénieurs, voyageurs ou explorateurs qu'elle a encouragés. En 1878 la Société de Géographie fait construire son hôtel particulier (qui est toujours le siège social) au 184 boulevard Saint-Germain et y installe sa bibliothèque. La salle des séances accueille des voyageurs, explorateurs et savants qui viennent présenter les résultats de leurs travaux ou de leurs expéditions. Ces conférences souvent accompagnées de projections de photographies sur plaque de verre provoquent l’engouement du grand public. La bibliothèque est confiée en 1881 à James Jackson qui fonde la collection de photographies en sollicitant des dons de photographies à caractère géographique. En 1925, la Société de Géographie s’enrichit par le don exceptionnel de la bibliothèque du prince Roland Bonaparte (voir entrée spécifique), légué par sa fille Marie de Grèce à la mort de son père, mais le volume même de ces collections oblige la Société à louer l’hôtel du prince Bonaparte au 10 avenue d’Iéna pour y transférer ses propres collections à côté de celles du prince. En 1941, des difficultés financières auxquelles s’ajoutent les incertitudes liées à l’occupation allemande amènent la Société de Géographie à conclure un accord de dépôt de ses collections à la Bibliothèque nationale. Le déménagement se fait dans des conditions difficiles, du 16 février au 24 mars 1942 qui auront comme conséquence la désorganisation de certaines collections. Depuis 1942, ces collections, toujours propriété de la Société de Géographie, sont conservées au Département des Cartes et Plans et constituent un fonds d’une grande cohérence et d’une incroyable richesse sur l’histoire des voyages et des explorations : 90 000 ouvrages, 2 000 titres de périodiques dont 320 vivants, 80 000 cartes, 500 cartons d’archives, 10 000 cartes postales, dessins, aquarelles, 100 000 photographies sur papier et 43 000 sur plaque de verre (ces dernières entrées en 1995-96). Les accroissements annuels courants sont modestes : 200 ouvrages et 500 fascicules de périodiques mais s’accompagnent régulièrement de dons d’importance inégale, parfois d’un très grand intérêt.
Fonds numérisés : Les collections de la Société de Géographie ont été parmi les premiers ensembles d’images numérisées. 20 000 photographies d’Afrique ont été numérisées dont 6 500 libres de droits sont accessibles sur Gallica depuis 1998 et intégrées en 2002 dans le programme « Voyages en Afrique ». Plusieurs ensembles de cartes, photographies, manuscrits sont numérisés dans le cadre des projets « Anthologie » ou « Voyages en Italie ».
Alfred Fierro, La Société de Géographie 1821-1946, Paris : H. Champion ; Genève : Droz, 1983 - « La Société de Géographie 1821-1996 » n° hors-série supplément d’Acta Geographica, n° 108 1996/IV - France Duclos, « La Bibliothèque et les Archives de la Société de Géographie » in Bulletin de la Société Française pour l'Histoire des Sciences de l'Homme, n° 7 (novembre 1992), pp. 40-47. Inventaires : - Claude Sibertin-Blanc, Bibliothèque de la Société de Géographie, catalogue des livres de la Réserve, Paris, Société de Géographie, 1952 - Alfred Fierro, Inventaire des manuscrits de la Société de Géographie, Paris : Bibliothèque nationale, 1984 - Alfred Fierro, Inventaire des photographies sur papier de la Société de Géographie, Paris : Bibliothèque nationale, 1986 (mis à jour et intégré dans BN-Opaline) Inventaire des cartes du fonds Bonaparte en cours dans BN-Opaline
Les documents cartographiques du Service hydrographique de la Marine sont parvenus à la Bibliothèque nationale en trois étapes, mais pas dans leur totalité. Au début de 1942, 45 pièces de grande valeur, dont 32 cartes manuscrites sur vélin furent extraites des “ Grandes Archives ” pour être mises en dépôt au Département des cartes et plans. En 1947, le Service hydrographique de la Marine à l’étroit dans ses locaux rue de l’Université déposait 14 566 pièces toutes antérieures à 1800, dont 237 cartes manuscrites sur vélin, classées chronologiquement par grandes régions côtières en 224 portefeuilles. Enfin en 1962 et 1965, le Département reçut les cartes de 1800 à 1940, gravées pour la plupart et réparties de la même manière ; d’autre part l’établissement public du Service hydrographique et Océanographique de la Marine (http://www.shom.fr) effectue le dépôt légal de la production contemporaine. La première formation des archives de la Marine remonte à Colbert, mais ce n’est qu’en 1699 que fut créé un dépôt comprenant d’une façon générale, les papiers de la Marine, des Galères, des Colonies et de la Maison du Roi et les cartes et plans hydrographiques. De 1720, date de la création du “ Dépôt général des cartes et plans, journaux et mémoires ” dont les ingénieurs étaient chargés de collecter, conserver et créer les documents hydrographiques, à 1722 s’opère le premier démembrement entre cartes, journaux et archives. Une seconde grande division intervînt pendant le XXe siècle, entre plusieurs institutions parisiennes. Si la plus grande partie des cartes et plans sont à Richelieu, les archives du Service hydrographique de la Marine, dont les journaux de bord, constituent la série JJ des Archives nationales, tandis que d’autres fractions ont été confiées à la Bibliothèque de l’Observatoire, à celle de l’Assemblée nationale, et des cartes manuscrites séparées ou en album sont au Service historique de la Marine (minutes du canal du Midi et plans de secteurs militaires signés Vauban…) et au Musée de la Marine. Enfin, il convient de remarquer qu’une partie des pièces cartographiques relatives aux voyages de circumnavigation exécutés par des navigateurs français (1787-1839) et des missions hydrographiques effectuées dans toutes les régions du monde (1816-1890) se trouve dans la sous-série 6 JJ des Archives nationales. Plans cadastraux des villes côtières, parcellaires de zones côtières, trajectoires de navigateurs, scènes de combats sur mer, cartes de courants marins, cartes topographiques d’entrée de rivières, croquis et vues de côtes et d’îles, cartes marines de toutes les parties du monde forment un ensemble unique de plus de trente mille pièces allant du XIVe siècle à nos jours, d’un grand intérêt pour l’histoire de la Marine, de la navigation, des découvertes, des sciences et des techniques cartographiques, de l’art, mais aussi pour l’histoire politique, administrative et militaire. Parmi les pièces anciennes, il y a lieu de citer la mappemonde de Nicolas Caverio (1502), celles qui proviennent des travaux des cartographes dieppois, Dupont, Guerard, Levasseur, Devaulx, celles des portugais Guttierez et Texeira, celles des hollandais Jean Dircks (1599) et Stiermann (1614). On trouve également tous les documents provenant des premiers explorateurs du Canada, de La Salle, Franquelin et aussi ceux qui résultent des grands voyages de circumnavigation et de découvertes, tels que le voyage de Louis Freycinet et ceux de Dumont d’Urville. Le département possède la collection la plus complète des cartes marines françaises manuscrites et éditées depuis le commencement du XVIIIe jusqu’à nos jours et celle de presque toutes les cartes marines étrangères, mais la dispersion irrémédiable des archives et des documents cartographiques constitue pour le chercheur une gêne. Cependant l’ère du numérique pourra dans une certaine mesure la réduire.
Covillault, P. Histoire des archives et de la bibliothèque du Service hydrographique de la Marine. Paris, 1979 "Notice sur le Service hydrographique de la Marine". Annales hydrographiques, 2e série, 1914, p. 1-49 Taillemite, Étienne. Les archives de la Marine conservées aux Archives nationales. Paris, 1980 Taillemite, Étienne. "Les cartes anciennes du Service hydrographique de la Marine conservées aux Archives nationales". Dans : La carte manuscrite et imprimée du XVIe au XIXe siècle, Journée d’étude sur l’histoire du livre et des documents graphiques, Valenciennes 17 novembre 1981, p. 19-32.