Edmond de Coussemaker (1805-1876)
Né à Bailleul (Nord) le 19 avril 1805, Edmond de Coussemaker se destina à la magistrature. Successivement avocat puis juge de paix, il exerça dans plusieurs villes du nord de la France. Ses travaux concernant l’histoire de la musique constituèrent toutefois une part importante de son activité et l’amenèrent à s’intéresser aussi bien à l’harmonie qu’à la chanson populaire ou aux anciennes notations musicales. Plusieurs ouvrages naquirent du fruit de ces recherches, notamment une édition des œuvres complètes d’Adam de la Halle – poésie et musique – parue en 1872 ainsi que la continuation du recueil Scriptorum de musica medii aevi, entrepris par le moine Gerbert, dont il publia quatre volumes de 1864 à sa mort.
Edmond de Coussemaker avait constitué une riche bibliothèque qui fut vendue lors d’une vente publique à Bruxelles en 1877. La Bibliothèque royale de Bruxelles acquit de nombreux volumes et la bibliothèque du Conservatoire de Paris s’enrichit également de 90 titres environ, concernant l’histoire de la musique. Quelques traités rares entrèrent ainsi dans ses collections tels les Opuscula musices de Simon Quercu ou le Musurgia seu praxis musicae de Luscinius. Les ouvrages acquis sont d'une grande diversité : publications du XIXe siècle (collection de 11 volumes du prince de la Moskowa, écrits de Joseph d'Ortigue), du XVIIIe siècle (L'Art de toucher le clavecin de François Couperin, quelques volumes de l'Almanach musical), des ouvrages théoriques manuscrits ou imprimés, des recueils rares de chansons (Ronsard mis en musique par Nicolas de La Grotte). Le carnet des entrées du fonds du Conservatoire donne le détail de cette acquisition (numéros 19870 à 19960 enregistrés au cours du deuxième trimestre 1877).
Charles-François Le Tellier, marquis de Montmirail, président de l’Académie des sciences à l’âge de 29 ans, en 1764, projetait la rédaction d’une bibliographie critique des voyages. Sa mort prématurée, dès l’année suivante, ruina le dessein en vue duquel il avait commencé à constituer une collection de livres imprimés. Son père, François-César Le Tellier, marquis de Courtanvaux et ancien officier, petit-fils de Louvois, fut élu à l’Académie des sciences en remplacement de son fils. Non seulement il conserva, mais il accrut la collection : grâce à des acquisitions de premier ordre qu’il poursuivit avec discernement, il fut bientôt à la tête d’une des bibliothèques de voyages les plus réputées de son temps, auquel il adjoignit un nouveau pôle d’intérêt, plus personnel celui-là, puisqu’il était astronome : l’histoire des sciences. À la mort du marquis de Courtanvaux, en 1781, la collection, qui avait acquis une grande renommée, fut mise en vente. Le libraire parisien Jean-Luc III Nyon, dit Nyon aîné, fut chargé d’en dresser le catalogue qui parut en 1782. Composé avec soin suivant le système des libraires de Paris, il voit sa partie géographique occuper plus du quart des 3599 notices : c’est elle qui réunit le plus grand nombre de livres rares, dans toutes les langues de l’Europe.
De nombreuses acquisitions furent faites pour le compte de la Bibliothèque du roi à la vente qui suivit. À défaut d’un registre d’acquisition (inexistant ou disparu ?), on dispose d’un exemplaire annoté du catalogue, où sont cochées les notices des volumes que ses gardes escomptaient faire entrer dans les collections, et qui, effectivement, pour certains, y sont entrés. Leur inventaire, en cours, dépasse la centaine de volumes, et supplée la fréquente omission, dans les catalogues, de la mention de l’ex-libris armorié et collé au verso du plat supérieur que ces ouvrages portent tous, ainsi que d’un timbre encré de rouge ou de noir aux mêmes armes. Beaucoup ne sont revêtus que d’une sobre reliure, le plus souvent de veau fauve. Si quelques-uns font partie de la Réserve des livres rares, beaucoup sont demeurés dans les départements thématiques, en particulier bien sûr le Département Philosophie, histoire, sciences de l'homme. Une étude fut menée par M. Garden en 1979 pour observer la physionomie bibliographique, d’après le catalogue, de cette collection aujourd’hui dispersée, dont seule une partie est présente dans les collections de l’établissement, tandis que le reste est probablement dispersé dans une multitude de collections publiques ou privées. Elle met l’accent sur les prix atteints à l’époque par certains titres, dont la trace est gardée par plusieurs exemplaires du catalogue, qui consignent également souvent l’identité des acheteurs.
Werner Paravicini, Die Nationalbibliothek in Paris : ein Führer zu den Beständen aus dem Mittelalter und der frühen Neuzeit, München ; New York ; Paris [etc.] : K.G. Saur, 1981, p. 59.
L’existence de la bibliothèque de Jean-Baptiste Colbert, à la fois instrument de travail de l’homme d’état et collection largement ouverte aux savants, est attestée dès 1659. Ses bibliothécaires sont Pierre de Carcavy puis l'érudit Étienne Baluze, qui joue un rôle déterminant dans sa constitution et sa gestion. En 1683, la bibliothèque passe au fils aîné de Colbert, Jean-Baptiste, marquis de Seignelay, qui continue l'œuvre de son père, puis au cadet, Jacques-Nicolas, archevêque de Rouen et enfin à leur neveu, Charles-Éléonor, comte de Seignelay. En avril 1728, ce dernier met en vente les 22.000 volumes entrés en sa possession. Les enchères durent six mois mais la vente est controversée et ne concerne finalement que les vélins et les livres imprimés, consistant en cadeaux, nouvelles parutions, achats faits en France et à l’étranger dans les librairies ou les ventes aux enchères, et même doubles de la Bibliothèque royale. Celle-ci n’en achète qu’un millier. De longues négociations évitent le même sort aux manuscrits, offerts en bloc au roi en 1732 moyennant le paiement de 300.000 livres. L’acquisition concerne les 6117 manuscrits anciens, dont 637 orientaux, 3582 latins, 877 grecs, des volumes en français, italien, espagnol…, plus 784 chartes originales et 1617 volumes de papiers modernes. Les dossiers de travail de Mazarin, dont Colbert a été l’exécuteur testamentaire, en constituent le noyau. A partir de 1664, s'y sont ajoutés les documents politiques ou administratifs copiés pour le ministre dans les dépôts d'archives. La bibliothèque a par la suite pris une dimension nouvelle avec l’arrivée de manuscrits originaux puis de textes anciens trouvés par les fonctionnaires royaux dans les institutions ecclésiastiques provinciales qui, en échange de compensations diverses, ont livré au ministre leurs fonds médiévaux. Des manuscrits ont été achetés en Orient, 800 volumes de haute époque réunis par Jacques-Auguste de Thou acquis en 1680. Parmi ces volumes, les belles reliures de maroquin rouge aux armes des Colbert sont nombreuses. A leur entrée dans la Bibliothèque royale, les papiers modernes sont répartis en quatre collections différentes, les fonds Languedoc-Doat, Flandre, Mélanges Colbert et Cinq Cents Colbert (voir à ces noms). Les dossiers de Mazarin quant à eux sont confiés aux Affaires étrangères. Les manuscrits anciens sont intégrés tant bien que mal dans le classement systématique instauré par Nicolas Clément en 1682: inscrits sous des cotes à exposants multiples, ils rendent totalement impraticable l’ancien inventaire et provoquent la recotation de tous les manuscrits en langues orientales, en grec et en latin de la Bibliothèque royale, suivie en 1739-1740 de la publication d’un catalogue imprimé en deux volumes. Le registre de prêts et les inventaires de la Colbertine sont conservés au Département des Manuscrits, de même que les archives de la gestion de Baluze (voir à ce nom). On peut aussi y consulter une concordance informatisée des cotes successives et des origines des manuscrits anciens, aujourd’hui tous intégrés dans les fonds par langues.
Bloch, Denise. "La bibliothèque de Colbert" Dans : Histoire des bibliothèques françaises, II, Les bibliothèques sous l'Ancien régime 1530-1789. Paris, 1988, p. 157-179 Colbert 1619-1683. Paris : Hôtel de la Monnaie, 1983 Collections de Louis XIV, dessins, albums, manuscrits. Paris : Grand Palais, 1977 Manuscrits, xylographes, estampages : les collections orientales du département des Manuscrits : guide / sous la direction d’Annie Berthier. – Paris : BnF, 2000, p. 9-10. Delisle, Léopold. Le Cabinet des Manuscrits de la Bibliothèque impériale. Paris, 1868, t. I, p.439-547
Léopold Delisle, Le Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque impériale [nationale] : étude sur la formation de ce dépôt, comprenant les éléments d’une histoire de la calligraphie, de la miniature, de la reliure et du commerce des livres à Paris avant l’invention de l’imprimerie, 1868-1881, t. I, p. 439-547. Inventaires mss et concordance informatisée à consulter au Dépt des Mss
Léopold Delisle, Le Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque impériale [nationale] : étude sur la formation de ce dépôt, comprenant les éléments d’une histoire de la calligraphie, de la miniature, de la reliure et du commerce des livres à Paris avant l’invention de l’imprimerie, 1868-1881, t. II, p. 290