Dès son arrivée en France en 1770, Marie-Antoinette avait disposé d’une bibliothèque particulière dont les livres étaient reliés à ses armes de dauphine, puis de reine à partir de 1774. Ses collections ne cessèrent de croître et leur disposition évolua à Versailles au gré des modifications incessantes effectuées dans ses appartements. En 1789, la bibliothèque du château repRéserve des livres raresentait près de 4000 volumes, répartis dans plusieurs pièces. La reine avait par ailleurs une bibliothèque à Trianon, d’environ 2000 volumes à la Révolution, mais qui avait cessé de s’accroître après 1781. En octobre 1789, quand la famille royale dut s’installer aux Tuileries, Marie-Antoinette fit déménager la bibliothèque du château dans ses appartements des Tuileries. Cette bibliothèque des Tuileries, qui fit l’objet d’un dernier catalogue en 1792 (BnF, Mss, n.a.f. 2513), servit à la famille royale, et tout particulièrement à Louis XVI qui avait laissé ses propres livres à Versailles, jusqu’au 10 août 1792. Elle échappa alors dans sa quasi-totalité au pillage et fut transportée à la Bibliothèque nationale dans les derniers jours de 1792. C’est le seul exemple d’une bibliothèque versée intégralement pendant la période révolutionnaire, sans aucun tri : elle apporta des ouvrages contemporains, d’actualité ou à caractère historique, et surtout des romans et des pièces de théâtre, qui ne correspondaient pas aux critères érudits ou bibliophiles des conservateurs et qui, souvent, n’avaient pas fait l’objet de dépôt légal. Les quelques volumes de gravures qui y figuraient furent remis au Cabinet des estampes. Les livres imprimés furent répartis dans l’ensemble du fonds de la bibliothèque ; la plupart sont maintenant à la Réserve des livres rares. La bibliothèque de Trianon, aux livres reconnaissables à leur chiffre CT au bas du dos, resta à Versailles et suivit le sort du dépôt littéraire de Versailles [voir notice Versailles].
1789. Le patrimoine libéré. Exposition, B.N., 1989, p. 226-231. G. Guilleminot, La dispersion des livres de Versailles (collections princières et dépôt littéraire) de 1789 à 1804, dans Association internationale de bibliophilie, XVIIe congrès, 1991, Paris, 2003, p. 90-93.
Charles-Théodore Malherbe (1853-1911) est une personnalité aux multiples facettes. Après l’obtention d’une licence de droit, il acquiert une solide formation musicale auprès de Dannhauser, Wormser et Massenet. Musicologue érudit, il collabore, de 1885 à 1893, à divers journaux musicaux (Le Ménestrel, Le Guide musical, La Revue internationale de musique, Le Monde artiste) et rédige également des notes de programmes pour les concerts parisiens. Fin connaisseur de l’histoire du théâtre lyrique, Malherbe publie plusieurs ouvrages musicologiques, certains en collaboration avec Albert Soubies : L’œuvre dramatique de Richard Wagner (Paris : Fischbacher, 1886), Précis d’histoire de l’opéra comique (Paris : A. Dupré, 1887), Mélanges sur Richard Wagner (Paris : Fischbacher, 1892), Histoire de l’Opéra-Comique : la seconde salle Favart (2 vol. Paris : E. Flammarion, 1892-93), Auber : biographie critique (Paris : H. Laurens, 1911). Il collabore à l’édition des œuvres complètes de Rameau chez Durand. Il travaille également avec Felix Weingartner à l’édition allemande des œuvres de Berlioz. Pianiste et compositeur, il laisse des opéras-comiques, des musiques de scène, un ballet-pantomime, des œuvres de musique de chambre. Il achève, en outre, l’œuvre posthume de Georges Bizet, Don Procopio.
En 1895, sur proposition de Charles Nuitter qui prépare sa succession à la tête de la bibliothèque et des archives de l’Opéra, Charles Malherbe est nommé archiviste-adjoint. A la mort de Nuitter, en 1899, il devient archiviste de l’Opéra et reçoit, en outre, le titre de bibliothécaire en 1909, à la mort d’Ernest Reyer. Dès 1899, il dirigeait de fait la bibliothèque et les archives de l’Opéra.
Charles Malherbe était également un collectionneur avisé d’estampes, de documents musicaux et principalement de lettres et de manuscrits autographes de maîtres anciens ou contemporains. Sa collection était extrêmement renommée et il y consacrait une grande partie de sa fortune personnelle, n’hésitant pas au passage à enrichir la bibliothèque de l’Opéra sur ses deniers propres. Son ami Jean-Baptiste Weckerlin agissait de même à la Bibliothèque du Conservatoire et certaines de leurs lettres révèlent les échanges et négociations auxquels se livraient les deux bibliothécaires dans l’intérêt de leurs établissements respectifs.
Sans héritier, Charles Malherbe avait fait savoir depuis longtemps qu’il désirait léguer sa collection à l’Etat français, afin qu’elle soit répartie entre les bibliothèques du Conservatoire et de l’Opéra ; le Conservatoire devant reverser à l’Opéra les ouvrages en double dont il n’aurait pas l’utilité. En échange de ce geste, son seul souhait aurait été de se voir décerner la Légion d’honneur, qu’il n’obtint jamais. Après son décès, le legs est officiellement accepté par le Ministre de l’instruction publique et des beaux-arts, le 23 décembre 1912.
Pris par ses nombreuses activités, Charles Malherbe n’avait pas pu achever lui-même le catalogue de sa collection. Les registres d’entrées du Conservatoire recensent en détail les ouvrages imprimés sur la musique, mais la collection d’autographes, riche de plusieurs centaines de documents, n’apparaît pas. Malherbe avait lui-même estampillé ses documents (estampille « clé de sol ») et une deuxième estampille « legs Malherbe » a été apposée sur tous les documents à leur réception. La provenance a également été inscrite sur les fiches lors du catalogage. Les contours de la collection peuvent être précisés aujourd’hui par la consultation des carnets de cotes.
La collection Malherbe ne comprend pas de pièces antérieures au XVIIe siècle. Parmi les plus remarquables, citons trois importants fragments de cantates de Bach, des manuscrits de Rameau, Mozart, Gluck, Vivaldi, Telemann, Galuppi, Boccherini, soixante-quinze manuscrits de Beethoven (dont une esquisse du final de la IXe Symphonie), une vingtaine d’esquisses de Haydn, une cinquantaine de pièces de Schubert, autant de Schumann, une trentaine de Mendelssohn. Chopin, Liszt, Berlioz, Wagner et Bruckner sont également représentés. La musique française est tout aussi à l’honneur puisque Malherbe recueillait les manuscrits de ses contemporains parmi lesquels Saint-Saëns, Debussy, Lalo, Franck, Chabrier, Chausson, Massenet, Fauré, d’Indy,… ne négligeant pas pour autant les contemporains étrangers : Moussorgsky, Tchaïkovsky, Smetana, Grieg. Cet ensemble de manuscrits prestigieux constitue aujourd’hui le cœur de la grande réserve du Département de la musique. De nombreuses lettres autographes figurent également dans cette collection, notamment de la main de Gluck ou de Berlioz.
La Bibliothèque-musée de l’Opéra conserve une partie des collections de livres et de partitions imprimées de Charles Malherbe provenant, pour une part, de dons faits de son vivant, depuis 1896, et pour une autre part, de doubles donnés par le Conservatoire à la suite du legs.
Mais c’est de l’activité de Charles Malherbe comme archiviste en son sein que la bibliothèque de l’Opéra conserve les traces les plus précieuses. A l’occasion de l’Exposition universelle de 1900 et du congrès d’histoire de la musique, une exposition de manuscrits musicaux anciens et contemporains devait avoir lieu à la bibliothèque de l’Opéra. Il entreprit donc de collecter systématiquement des autographes de compositeurs contemporains : une lettre circulaire demandait la transcription d’un morceau représentatif sur un papier fabriqué spécialement et l’envoi d’une photographie. Le résultat de cette collecte (700 manuscrits environ et un peu moins de photographies), conservé sous la cote CS 1900, a été relié en 20 volumes classés par pays (puis par ordre alphabétique de compositeurs) : Allemagne (3 volumes), Amériques et Angleterre, Autriche-Hongrie, Belgique-Espagne-Finlande, France (9 volumes), Italie, Pays-Bas-Perse-Pologne-Portugal-Roumanie, Russie, Scandinavie, Suisse.
Ecorcheville, Jules. « Charles Malherbe : 1853-1911 », S.I.M. (Société internationale de musicologie), VIIe année, n°11, 15/11/1911, p. 1-4
Valérie Gressel. Charles Nuitter : des scènes parisiennes à la Bibliothèque de l’Opéra. Hildesheim : G. Olms Verlag, 2002. Musikwissenschaftliche Publikationen, 18.
Lebeau, Elisabeth. « Un mécène de la musique, Charles Malherbe », Humanisme actif : mélanges d’art et de littérature offerts à Julien Cain, Paris, 1968, p. 91-99
François Lesure, « The Music department of the Bibliothèque nationale », Notes / Music library association, 1978, p. 251-268.
Marcel Maréchal
1937 –
Comédien, metteur en scène, auteur dramatique, directeur de théâtre
Marcel Maréchal est né à Tassin-la Demi-Lune, près de Lyon. Attiré par le cinéma, il rêve de se présenter au concours de l’IDHEC [Institut des hautes études cinématographiques] à Paris mais, pour des raisons matérielles, il est contraint de demeurer à Lyon où il s’inscrit à la Faculté de droit. En 1958, il fonde avec d’autres étudiants la Compagnie du Cothurne, qui monte des œuvres d’Anouilh, Arrabal, Synge, Ghelderode et qui, très vite, va devenir une compagnie professionnelle.
En 1960, la Compagnie du Cothurne s’installe dans la petite salle de la rue des Marronniers de Lyon que Roger Planchon vient de quitter pour le théâtre de Villeurbanne. En 1963, Marcel Maréchal crée Le cavalier seul, de Jacques Audiberti, un de ses auteurs de prédilection. Il reprendra cette pièce à diverses reprises : au Studio des Champs-Elysées à Paris en 1964, au Festival d’Avignon en 1975, à Buenos Aires en 1983. Au théâtre des Marronniers il met aussi en scène des textes de Jean Vauthier (Capitaine Bada) et Louis Guilloux (Cripure), deux auteurs auxquels il est également attaché, ainsi que des pièces d’Obaldia, de Beckett, Limbourg, Hugo, Claudel, Ionesco…
En 1968, il prend la direction du Théâtre du Huitième, une salle de 1 100 places que la ville de Lyon vient d’aménager. Cette salle est inaugurée avec La poupée de Jacques Audiberti. Au programme de la même année figurent un Don Juan de Molière, mis en scène par Patrice Chéreau et deux autres spectacles de la compagnie du Cothurne : La mort de Danton, de Büchner, et la Moscheta de Ruzzante, qui remporte le Prix de la critique. Très rapidement, Marcel Maréchal et sa compagnie parviennent à insuffler une telle vitalité et un tel rayonnement à leur théâtre que celui-ci parvient à rassembler plus de 20 000 abonnés. La compagnie du Cothurne devient Centre dramatique national en 1972. En 1974, invitée au festival d’Avignon, elle présente trois spectacles dans la cour d’honneur du Palais des Papes : La Poupée, de Jacques Audiberti, Fracasse de Serge Ganzl, Hölderlin de Peter Weiss.
Marcel Maréchal met en scène en 1975 un de ses propres textes : Anémone pour Guignol qui sera à la fois son spectacle d’adieu au public lyonnais et son premier spectacle marseillais. La ville de Marseille l’a en effet invité à prendre la succession d’Antoine Bourseiller au Théâtre du Gymnase. Parallèlement à ses mises en scène au théâtre du Gymnase il crée, avec Jacques Angeniol, le « Théâtre hors les murs », une structure destinée à aller au-devant du public qui hésite à franchir le seuil des salles de théâtre. En 1981, Marcel Maréchal s’installe au Théâtre de la criée, qui est inauguré en mai. Outre Molière et Shakespeare il y met en scène La vie de Galilée, de Bertolt Brecht, ainsi que des textes de Jean-Pierre Faye, Marcel Jouhandeau, David Mamet, Sam Shepard…
En 1995, il prend la direction du Théâtre du Rond-Point à Paris. Il quitte ce théâtre en 2001 pour succéder à Jean Danet à la tête des Tréteaux de France, Centre dramatique national itinérant.
Le département des arts du spectacle a reçu du Théâtre de la Criée un don qui permet de retracer l’expérience théâtrale menée par Marcel Maréchal à Marseille entre 1977 et 1990 : programmes, affiches, dossiers de presse et matériel publicitaire concernant les spectacles montés ou accueillis à Marseille par Marcel Maréchal. Ce don a été complété par un ensemble de documents couvrant ses activités depuis la création de la Compagnie du Cothurne à Lyon jusqu'à la direction du Théâtre du Rond-Point à Paris.
Ce fonds est coté 4-COL-2. Un inventaire (Inv. 16) est disponible en salle de lecture.
La Criée, un théâtre dans la cité. Marseille, J. Laffitte, 1991. 157 p. : ill. Ferla, Patrick. Conversation avec Marcel Maréchal. Paris ; Lausanne : P.M. Faure, 1983 - 241 p.-[64] p. de pl. : ill. (Les Planches). Maréchal, Marcel. Marcel Maréchal: un colossal enfant. Entretiens de Marcel Maréchal avec Nita Rousseau. Arles, Actes Sud ; Marseille : Théâtre national de Marseille-La Criée, 1992: 105 p. Maréchal, Marcel. La Mise en théâtre. Présenté par Hélène Parmelin. Paris, Union générale d'éditions, 1974. 232 p. : ill. (10-18 ; 897). Maréchal, Marcel. Rhum limonade: de Guignol à Cripure. Paris, Flammarion, 1995. 256 p. Maréchal, Marcel. Saltimbanque. Avec la complicité de Pascal Lainé. Paris, Fayard, 2004 196 p.-[4] p. de pl.