François Lesure, « The Music department of the Bibliothèque nationale », Notes / Music library association, 1978, p. 251-268.
Lacour, Marcelle de (1896-1999)
Marcelle Schaeffer est née en 1896 à Besançon où elle s'intéresse à la musique : au Conservatoire de Besançon elle entreprend des études très complètes qu'elle achèvera au Conservatoire de Paris (piano, harpe, chant, histoire de la musique). Mariée au comte Robert de Lacour, docteur en droit et lui-même amateur de musique, elle vient à Paris dans les années vingt où elle devient l'élève de Lily Laskine pour la harpe et de Wanda Landowska pour le clavecin. Bien qu'elle ait participé à des concerts en tant que chanteuse (elle chante le Pie Jesu de Gabriel Fauré aux Invalides après la disparition de Mermoz en mer), elle se consacrera exclusivement au clavecin. Elle devient l'interprète d'auteurs anciens comme Louis et François Couperin dont elle enregistrera quelques pièces et participe aux concerts de la Société de Musique d'autrefois fondée par Geneviève Thibault de Chambure. D'autre part, dans les années 30, elle sollicite les compositeurs contemporains afin d'enrichir le répertoire de son instrument. Elle est l'inspiratrice et la dédicataire de nombreuses œuvres comme le Concerto pour clavecin de Bohuslav Martinu (1935) ou le Prélude et fugue d'Alexandre Tansman (1935). Ces manuscrits ou éditions se trouvent aujourd'hui au département de la Musique. En 1955, elle crée la classe de clavecin du Conservatoire de Paris, dont elle est titulaire de 1958 à son départ en 1967, et y forme de nombreux élèves français et étrangers. La Fondation Marcelle et Robert de Lacour pour la musique et la danse située au château de Fourg (Doubs) entretient la mémoire de cette interprète et mécène.
En 1988, Marcelle de Lacour fit don au département de la Musique d'une centaine de pièces pour clavecin sous la forme de manuscrits et d'éditions dédicacés par leurs auteurs à leur brillante interprète, auteurs parmi lesquels on peut citer Jacques Ibert, Georges Migot, Paul Ladmirault, Jean Langlais, Bohuslav Martinu, Alexandre Tansman, René Leibowitz et Louis Saguer. Le Don 88-32 (1-102) a fait l'objet d'une entrée détaillée au carnet de don. Les pièces sont accessibles par les fichiers auteurs.
Les Catalogues imprimés de la Bibliothèque nationale : liste, description, contenu, Paris : Bibliothèque nationale, 1943, Impr. 52
Jolivet, André (1905-1974)
Les archives d'André Jolivet, qui sont restées intactes après son décès, constituent un ensemble exceptionnel de manuscrits musicaux du 20e siècle.
Elève de Paul Le Flem et d'Edgar Varèse, André Jolivet fonde en 1936 avec Olivier Messiaen, Daniel-Lesur et Yves Baudrier le groupe "Jeune France", pour une "réincarnation de la musique dans l'homme". Musicien dont l'univers réunissait Beethoven, Debussy, Bartok, Stravinsky, Ravel, Berg, Schönberg et Varèse, il compose une œuvre audacieuse, insolite, parfois violente, où les recherches sur le langage obéissent à une exigence spirituelle, celle de rendre à la musique sa puissance magique et incantatoire. Foncièrement original, indépendant et novateur, il se place en dehors de tout dogmatisme. Marius Constant estimait qu'il est "à classer dans les inclassables".
Petit à petit ses manuscrits autographes entrent au Département de la Musique de la BnF : en 1998, nous avons acheté les manuscrits des œuvres concertantes, entre autres celui du Concerto pour piano, ceux des Concertos pour trompette, en 2001 les manuscrits des œuvres vocales : par exemple Le Cœur de la matière ou celui de l'opéra-bouffe Dolorès, puis en 2002, une dation en paiement des droits de succession permet l'acquisition d'une partie de ses œuvres symphoniques et d'un ensemble de documents autour de Mana. A côté des trois Symphonies (1953, 1959 et 1964), la BnF reçoit les manuscrits de Cosmogonie (1938), de la Suite transocéane (1955), de la Suite française (1957), de Psyché (1946) et de Fanfares pour Britannicus (1946), qui rappellent l'homme passionné de théâtre, et celui des Cinq Danses rituelles (1939). Enfin, le Département de la Musique voit son fonds sur Mana enrichi de plusieurs documents : le brouillon de La Chèvre et de L'Oiseau, deuxième et quatrième parties de cette pièce, un exemplaire de l'édition publiée en 1946, annotée et commentée par l'auteur, des dessins originaux à la plume et des projets de couverture pour cette édition et pour le fac-similé du manuscrit qui servit lors de la première exécution. Cette œuvre majeure dont la création en 1935 provoqua l'admiration enthousiaste d'Olivier Messiaen porte un titre qui peut paraître mystérieux, "le Mana désigne dans les sociétés primitives cette force qui nous prolonge dans nos fétiches familiers". Cette suite pour piano seul a été inspirée par les six objets "fétiches" que Varèse avait offerts à Jolivet au moment de son départ pour les États-Unis en 1933.