Fonds Silvia MONFORT 1923-1991
L'itinéraire de Silvia Monfort est celui d'une femme habitée par un désir d'exigence. Sa vie est une succession d'engagements. Elle commence sa carrière au cinéma avec un film de Robert Bresson, Les Anges du péché, et dans le même temps rejoint le combat de la Résistance aux côtés de l'écrivain et critique dramatique, Maurice Clavel, qu'elle épousera. Celui-ci la présente à Jean Vilar qui l'engage dan sa troupe du Théâtre National Populaire Cette rencontre détermine son choix d'un idéal de vie professionnelle fondé sur : l'adoption d'un répertoire large et difficile, l'anonymat de la vie de troupe et le respect profond pour un public populaire peu familier du théâtre. Tous ses combats futurs sont nés de cette expérience structurante. Parallèlement à sa carrière cinématographique, elle interpréte conjointement grands textes du répertoire classique et auteurs contemporains (Claudel, Audiberti). C'est dans les rôles tragiques qu'elle donne la mesure de son talent. Sa voix rauque et son jeu dépouillé marquent à jamais les rôles de Phèdre et d'Electre.
Elle participe au mouvement de décentralisation théâtrale : dès 1960 elle joue chez R. Planchon à Villeurbanne, au Théâtre D. Sorano à Vincennes, aux côtés de Jean Danet et sous chapiteau itinérant des Tréteaux de France (1965), retrouvant par-là la démarche de Jean Vilar et de son TNP. Le choix courageux de son répertoire montre son souci de toucher un public populaire sur le lieu de sa vie quotidienne. Forte de ces expériences elle décide de se lancer dans une aventure, qui sera celle de sa vie puisqu'elle la mènera à bien, peu de temps avant sa mort, la création d'un nouveau lieu de spectacle. Plutôt qu'un théâtre traditionnel, c'est un centre culturel qu'elle veut fonder. C'est le début d'une suite de déménagements dans la Capitale de ce "Carré", (elle récuse le nom de théâtre), qui de "Carré Thorigny", en "Nouveau Carré" prend définitivement sa place dans le quartier de Vaugirard sous le nom de "Carré Silvia Monfort". Elle ne verra pas l'aboutissement de ce projet dans lequel elle a jeté ces dernières forces mais qui porte son empreinte tout autant que son nom. Dans sa programmation demeure toujours chez Silvia Monfort la volonté de dépasser les ostracismes pour, en toute liberté et démarche novatrice, accueillir toutes les formes de spectacles, danse, chanson, Cirque…
Elle donne leur chance à de jeunes compagnies : de mime, de danse. Elle permet aux parisiens de découvrir une nouvelle forme d'expression corporelle : le Bhûto. C'est dans le même élan de générosité qu'elle crée avec Alexis Gruss une école de cirque et de mime. Toujours curieuse de l'avenir, n'accordant que peu de place au passé, à ses succès, soutenue par la passion et l'énergie créatrice, Silvia Monfort laisse l'image d'une femme volontaire, dont la morale dicte toutes les démarches de sa vie d'artiste et de directrice de théâtre La collection, donnée au Département du spectacle, en 1992 par le "Carré Silvia Monfort" concerne surtout son activité aux "carrés" de 1972 à 1991, on y trouve, des affiches, programmes, photos, recueil de presse, maquettes, et des costumes. Un inventaire de ce fonds (coté 4-COL-66/) est à la disposition des lecteurs. Une exposition a été consacrée à cette interprète fin 2003 à la BNF Les catalogues des documents conservés par le Département des Arts du spectacle permettent également d'illustrer la carrière de cette comédienne.
Larrey, Félix-Hippolyte (1808-1895) (Z Larrey)
Félix-Hippolyte Larrey est à l'origine du don à la Bibliothèque nationale des ouvrages hérités de son père Dominique-Jean Larrey (1766-1842), don effectué par sa légatrice Melle Juliette Dodu (1848-1909), qui fut sa compagne à qui il légua sa fortune. Juliette Dodu, héroïne de la guerre de 1870, est la première femme en France à recevoir la médaille militaire et la Légion d'honneur à titre militaire.
Dominique-Jean Larrey (1766-1842), son père, fut chirurgien des armées de la Révolution française, puis chirurgien en chef de la Grande armée. Il fut une figure de l’épopée napoléonienne : après avoir participé à l’Expédition d’Egypte aux côtés de Bonaparte, dont il devint l’ami, il fut anobli par l’empereur sur le champ de bataille de Wagram (1809) et fait prisonnier à Waterloo après avoir été blessé. En 1829, il fut élu membre de l’Institut. Il constitua une collection d’ouvrages sur l’histoire de la Révolution et de l’Empire et sur la vie de Napoléon Ier, de Napoléon III et de leurs familles qui fut reçue en don à la Bibliothèque nationale.
Cette collection constitue un fonds particulier de près de 900 volumes (dont quelques "pièces") dans le département Philosophie, histoire, sciences de l'homme sous la cote Z Larrey : 12 Gr. Fol., 36 in-Fol, 134 in-4°, 711 in-8° ; elle comporte aussi un nombre restreint de documents (Albums, recueils de planches gravées, etc.) conservés sous différentes cotes : Qe 36 xxx, Qe 31a au département des Estampes et de la photographie.
La collection a fait l’objet d’un catalogue (1896) où les ouvrages, répartis en 13 sections thématiques, sont classés par :
Grand admirateur de Joris-Karl Huÿsmans le libraire Pierre Lambert (1899-1969), dans sa librairie "Chez Durtal", consacra sa vie à réunir une collection entièrement consacrée à cet écrivain, constituée de manuscrits, correspondance, documentation, dossiers de travail, fichiers, livres sur Huÿsmans et livres provenant de la bibliothèque de celui-ci, iconographie et objets. On notera aussi une importante section consacrée aux archives de l’abbé Boullan et à l’hérésie vintrasienne, qui avait eu un grand rôle dans l’évolution de la pensée de Huÿsmans.
A sa mort en 1969 il légua cette collection à la « réunion des bibliothèques nationales », souhaitant qu’elle reste telle qu’il l’avait constituée, avec son cadre de classement et sans que les manuscrits soient séparés des imprimés. C’est pour cette raison qu’elle fut attribuée en 1970 à la bibliothèque de l’Arsenal, spécialisée en littérature française. Depuis on s’est attaché à enrichir ce fonds afin qu’il reste un instrument de travail vivant, grâce au dépôt légal pour les études sur Huÿsmans ou les rééditions, mais aussi par achat de manuscrits autographes, de correspondance, d’éditions originales, et grâce à un certain nombre de dons.
Un inventaire est consultable en ligne dans le catalogue BnF Archives et manuscrits :
- J. Lethève, « La donation Pierre Lambert à la bibliothèque de l’Arsenal », dans Bulletin du bibliophile, 1972, p.184-188. - « La Bibliothèque de l’Arsenal », Arts et métiers du livre, 1997, n° 206, p. 554-556. - Joris-Karl Huysmans : du naturalisme au satanisme et à Dieu : [exposition], 1979, Bibliothèque nationale, [Bibliothèque de l'Arsenal, Paris, 7 juin-22 juillet], Paris : Bibliothèque nationale, 1979. Disponible en ligne, url : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6532566b.
Fonds Kochno.
Né à Moscou en 1904, Boris Kochno quitte la Russie pour Paris en 1919 et devient l’année suivante le secrétaire du fondateur des Ballets russes, Serge Diaghilev. De 1909 à 1929 triomphent en effet dans toute l’Europe, les Ballets Russes de Serge Diaghilev. Pas seulement russe et pas uniquement composée de ballets, cette troupe propose une synthèse où musique, ballet, décors, costumes concourent à un spectacle total et dont le Sacre du Printemps (1913) et Parade (1917) sont deux des exemples les plus aboutis. Spectacle international à multiples facettes avec des musiciens aussi différents que Debussy, Falla, Darius Milhaud, Poulenc, Prokofiev, Ravel, Satie, Sauguet et Stravinsky, des thèmes aussi divers que la vieille Russie, le néo-clacissisme et l’art moderne, il fait appel à des décors et costumes populaires sauvagement colorés de Bakst, Larionov et Gontcharova, néoclassiques de Braque, Juan Gris, Josep-Maria Sert et Pere Pruna, exotiques d’Henri Matisse, surréalistes de Survage, constructivistes de Gabo et Yakoulov, cubistes de Braque et Tchelitchev. Boris Kochno joue très vite le rôle de conseiller artistique des Ballets russes et écrit même l’argument des ballets Les Fâcheux (1924), Zéphire et Flore (1925), La Chatte (1927), Les Dieux mendiants (1928), Le Fils prodigue (1929). A la mort de Diaghilev (1929), il devient en 1930 le conseiller de l’impresario Charles Cochran puis, de 1931 à 1932, celui des Ballets russes de Monte-Carlo (pour lesquels il écrit des livrets de ballets), puis fonde et dirige pour une saison avec George Balanchine « Les Ballets 1933 ». A partir de 1934, Kochno collabore à nouveau avec les Ballets russes de Monte-Carlo jusqu’en 1939. Il fonde en 1945 avec Roland Petit les Ballets des Champs-Elysées, dont il est le directeur artistique jusqu’en 1951.
Si la Bibliothèque-Musée de l’Opéra a reçu le versement des maquettes de décors et costumes des productions du théâtre, pour les Ballets Russes, présentés à l’Opéra en 1909, 1910, 1911-1912, 1914, 1919, 1920, 1922 et 1928, cet usage ne pouvait s’appliquer, s’agissant d’une compagnie invitée et non de « productions propres ».
C’est au travers de reprises, par l’Opéra, de spectacles créés ou recréés par les Ballets Russes (Petrouchka, le Coq d’Or, Giselle…) et faisant appel aux mêmes artistes (les décorateurs Bakst, Benois, Gontcharova …, le danseur-chorégraphe Lifar) que la Bibliothèque-musée de l’Opéra a acquis le dépôt de dessins inspirés des Ballets Russes, même s’ils n’en proviennent pas directement. Dans un deuxième temps, une politique de dons ou d’achats, encore bien limitée a permis d’acquérir un petit nombre de documents iconographiques relatifs aux Ballets Russes provenant de Serge Lifar, d’Alexandre Benois ou des héritiers de Larionov et Gontcharova, ou de Bakst, puis d’accepter, en 1974, le don important des dessins « de folie » de Nijinsky fait par la fille du danseur. C’est pratiquement à la même époque que la dispersion possible des collections de Boris Kochno émut le Ministère de la Culture. En 1975, Kochno mettant en vente une partie de ses collections, la Bibliothèque nationale se porta acquéreur d’un fonds de correspondance, partitions et photographies divisé entre le Département de la Musique (site Louvois) pour les partitions, la Bibliothèque-musée de l’Opéra pour la correspondance et les photographies originales des productions des Ballets Russes (près de 700 dans 25 albums). Après la mort de Boris Kochno (9 décembre 1990), ses héritiers mirent en vente en 1991 chez Sotheby’s les restes de sa succession. La Bibliothèque nationale se porta acquéreur, pour la Bibliothèque-musée de l’Opéra, d’un très important fonds d’archives, correspondance, projets, ébauches de travaux, mémoires, dont des lettres et carnets d’esquisses de peintres.
Dès lors, en supplément à ce fonds considérable, la B.M.O. continua de se porter acquéreur de fonds iconographiques ou documentaires sur les Ballets Russes : en 1995, une gouache de Nathalia Gontcharova pour Cendrillon ; en 1998, un dessin de Valentine Hugo réalisé lors de la création du Sacre du printemps et un dessin de Larionov pour l’Après-midi d’un faune ; en 1999, des dessins anonymes représentant des grandes danseuses des Ballets Russes, en 2000 un autre dessin de Valentine Hugo représentant Nijinsky dans le Spectre de la rose…. ; en 2003, des photographies de danseurs des ballets russes (Nijinski et Tamara Karsavina, entre autres) par Fischer.
En 2002 enfin, la Bibliothèque-musée de l’Opéra s’enrichit par dation des maquettes de décors et de costumes, des dessins et des tableaux que Monsieur Juan de Beistegui avait acheté, de son côté, lors de la vente de 1975 et mis en dépôt à la Bibliothèque-musée de l’Opéra. Grâce à cette dation, la Bibliothèque-musée de l’Opéra conserve un ensemble exhaustif sur les Ballets Russes comme il y en a peu au monde. Les trois autres collections comparables sont celle du Victoria and Albert Museum, à Londres, celle du Musée d’Hartford, dans le Connecticut (provenant de Serge Lifar), et celle de John Neumeier.
La collection de la Bibliothèque-musée de l’Opéra sur les Ballets russes se caractérise par sa qualité, des artistes prolifiques mais, en général, en début de carrière comme Bakst, Benois, Gontcharova ou Pruna ayant donné ce qu’ils avaient de plus spontané, riche et créatif aux Ballets Russes. En outre, elle se partage harmonieusement entre l’iconographie des productions et les portraits, tantôt réalistes, tantôt fort caricaturaux des artistes ou dirigeants des Ballets Russes (portrait de Diaghilev par Léon Bakst, Jean Cocteau, Michel Larionov, portrait de Boris Kochno par Robert Delaunay, Juan Gris, Michel Larionov, Picasso, portrait de Walter Nouvel par Bakst, autoportrait d’Henri Matisse).
Au sein du fonds sur les Ballets russes conservé à la Bibliothèque-musée de l’Opéra, on distingue donc :
Hommage à Boris Kochno (1904-1990) / Opéra national de Paris. Paris : Opéra national de Paris, [2001].
Le fonds Kochno a fait l’objet de deux expositions à la Bibliothèque nationale :