Collection Charles DULLIN
Charles DULLIN (1885-1949) disciple de Jacques Copeau, membre fondateur du Cartel, acteur, metteur en scène, théoricien français du théâtre, est engagé en 1906 par André Antoine à l’Odéon, il débute dans le rôle de Cinna de Jules César de Shakespeare. En 1909 il fonde un Théâtre de Foire à Neuilly, entre au Théâtre des Arts (dirigé par Jacques Rouché) en 1910, participe en 1913, avec Jacques Copeau, à la Fondation du Vieux Colombier et y reste jusqu’en 1919. Il Fréquente le cours de Firmin Gémier et le suit à la Comédie-Montaigne. A l’automne 1921 il ouvre L’Atelier, dans un local provisoire et en 1922 l’installe dans l’ancien Théâtre Montmartre. En 1927, contribue à la création du Cartel en compagnie de Georges Pitoëff, Louis Jouvet, Gaston Baty. Il quitte, en 1940, la direction de l’Atelier, pour celle du Théâtre de la Cité, ancien Théâtre Sarah-Bernhardt. Il y crée, en 1943, Les Mouches de Jean-Paul Sartre. Après la Libération, déçu par l’incompréhension de la critique, il abandonne ce Théâtre pour se consacrer aux tournées , à la mise en scène et à la quête d’un nouveau lieu où s’installer. Il monte en 1949 L’Archipel Lenoir de Armand Salacrou et meurt peu après. La conception du théâtre selon Dullin, le conduit à s’écarter des modèles du Romantisme et du Naturalisme car il souhaite revenir à la vraie tradition du spectacle : il se réclame de la Commedia dell’arte et du Théâtre japonais. Il fonde une école et le Théâtre de l’Atelier devient un laboratoire d’essais dramatiques, une organisation corporative. Dullin élabore ses propres techniques à partir d’exercices fondés sur les cinq sens (Marcel Marceau est l’un de ses anciens élèves) et des pratiques du Théâtre Elisabéthain. Pour Dullin mettre en scène signifie revenir aux principes fondamentaux : un texte, des comédiens, un tréteau. Le texte est l’essentiel. Son répertoire mêle reprise et création, choisies en fonction du SUJET. Plutôt que des décors en trompe-l’œil, il préconise un espace scénique flexible, où le proscenium comme cadre de scène serait mobile. L’architecture scénique ne peut être conçue qu’en fonction du répertoire . Pour lui, il y a deux sortes de mises en scène : Le théâtre de « l’édition » ou de reproduction qui copie fidèlement une mise en scène donnée ; le théâtre de « création » où la mise en scène , simple, ingénieuse et subtile, sans être coûteuse souligne l’importance de l’esprit. Dullin, adepte de la Décentralisation, recherche les moyens de toucher un public populaire, participe au mouvement C.I.D (culture par l’initiation dramatique). Pour le gouvernement du Front Populaire, en 1937, il rédige un rapport sur la Décentralisation théâtrale. Pédagogue, théoricien, Dullin marquera, Antonin Artaud, Jean-Louis Barrault, Marcel Marceau, André Barsacq, Maurice Sarrazin, Jean Vilar…
A la mort de Simone Jollivet-Sens, sa compagne, en 1968, une partie de la documentation concernant les spectacles montés par C.Dullin est remise au Département des Arts du spectacle. Ce don comprend 350 costumes de scène, des manuscrits, des maquettes, des photographies, des recueils de coupures de presse, et complète les nombreux achats de maquettes de décor et de mises en scène écrites faits antérieurement à Simone Jollivet. En 1970 Jacques Teillon, neveu de Dullin et administrateur du Théâtre de l’Atelier y ajoute des objets personnels de Dullin, une correspondance entre Dullin et sa sœur Pauline, une autre avec Simone Jollivet. L’association des Amis de Charles Dullin, contribue également à l’enrichissement de ce fonds. Un inventaire de cette collection auquel on a joint un ensemble concernant la vie de Simone Jollivet peut être consulté au Département des Arts du spectacle.
Corvin (Michel).- Dictionnaire encyclopédique du théâtre…. Paris : Bordas, 1995. Dullin (Charles).- Ce sont les Dieux qu’il nous faut…Paris : Gallimard, 1969. Collection : Pratique du théâtre . Mignon (Paul-Louis).- Charles Dullin….Lyon, La Manufacture, 1990. Collection : Les Classiques de La Manufacture [Exposition. Paris. Bibliothèque de l Arsenal. 1969].- Catalogue. Charles Dullin :1885-1949.Paris, impr. Olivier Perrin, 1969. [Exposition. Paris. Bibliothèque nationale. 1987].- Catalogue . Le Cartel : Jouvet, Dullin, Baty, Pitoëff. 1987
Inventaire manuscrit : MMA-109
Collection Jacques COPEAU
Après des études de lettres et de philosophie, Jacques Copeau (1879-1949) débute comme critique d’art, de littérature et, surtout, de théâtre. Il collabore à la Revue d’art dramatique, l’Ermitage, La Grande Revue. Il fonde, en 1909, avec André Gide, et Gaston Gallimard, La Nouvelle Revue Française, qu’il dirige jusqu’en 1913, date à laquelle il ouvre le théâtre du Vieux-Colombier. En 1914 la guerre l’oblige à fermer son théâtre mais il continue à approfondir sa réflexion et ses connaissances, grâce à ses rencontres avec, Edward Gordon Graig , Jacques-Dalcroze, et Adolphe Appia. De 1917 à 1919, il part avec sa troupe pour deux saisons à New-York. 1920 voit : la création de L’Ecole (en projet depuis 1913) et la réouverture du théâtre qui affiche au cours des quatre saisons suivantes, Mérimée : Le Carrosse du St Sacrement ; Shakespeare : la Nuit des rois ; Molière : L’Amour médecin…Vildrac, Martin du Gard. En 1924, il monte une pièce de lui : la Maison natale, qui ne rencontre pas l’adhésion du public . La fermeture définitive de son théâtre le conduit à concrétiser un projet de « retraite » en Bourgogne. Une trentaine de disciples l’y suivent afin de poursuivre un travail de formation et de recherche qui aboutira à la constitution d’une troupe « Les Copiaus ». Celle-ci se produit d’abord dans la région puis au delà, et propose un répertoire composé de spectacles collectifs, de saynètes, mimes, chansons, farces, jusqu’à sa dissolution en 1929. Copeau se consacre alors à des activités diverses : conférences, lectures de pièces, critiques dramatiques aux Nouvelles littéraires. En 1933 il met en scène le Mystère de Santa Uliva dans un cloître de Florence . Associé de 1936 à 1939, par l’administrateur E. Bourdet aux côtés decLouis Jouvet, Charles Dullin, Gaston Baty, au renouveau de la Maison de Molière, il monte plusieurs spectacles à la Comédie-Française avant d’y occuper en 1940,pour moins d’un an, le poste d’administrateur. en 1941, il publie un petit essai « Le Théâtre populaire », et en 1943, après en avoir fait l’adaptation , il monte Le Miracle du pain doré, dans la cour des Hospices de Beaune. Il meurt dans sa région d’élection en 1949 laissant une pièce inédite Le Petit pauvre, qui sera créée à San Miniato en 1950. Copeau est venu au théâtre par « une impulsion de moralité littéraire », sans aucune formation, ni expérience pratique, il connaît par contre les grands théoriciens du passé ou contemporains et s’en inspire pour constituer sa propre doctrine. Il fustige le mercantilisme , le cabotinage, la bassesse des œuvres et des mœurs. Chez lui les exigences morales et esthétiques vont de pair d’où la nécessité d’une réforme des acteurs (création d’une école, d’un mode de vie communautaire autour du chef, réglé avec rigueur et discipline), qui vont former une troupe homogène et enthousiaste rompue à tous les emplois. Le répertoire fait la part belle aux œuvres classiques (choix novateur pour l’époque), car à travers ces exemples de beauté et de vérité Copeau veut stimuler l’inspiration des meilleurs écrivains et régénérer le goût du public pour le fidéliser et le rendre juge, non d’un spectacle, mais de la démarche d’ensemble du Vieux-Colombier . La création d’une revue « Les Cahiers du Vieux-Colombier » est une démarche volontariste en direction de son public. Copeau metteur en scène accorde la première place au texte dramatique , adepte du « tréteau nu », il transforme la scène du Vieux-Colombier en une architecture fixe où peut se jouer n’importe quelle pièce. Sur un fond neutre, les costumes (dont les couleurs et les matériaux sont très étudiés) mis en valeur par un éclairage très soigné, font ressortir les acteurs, éléments essentiels de la mise en scène. A partir de 1924 Copeau souhaite atteindre un public plus « populaire » et lui offrir « une comédie nouvelle » d’où ses recherches sur les techniques de la Commedia dell’arte, et sa prédilection pour le théâtre antique, grec et médiéval. Copeau, par son Ecole et ses options esthétiques et morales, inspire la création du Cartel (formé par Dullin, Baty, Jouvet, Pitoëff). Il influence tout le théâtre d’après guerre en particulier le mouvement de décentralisation et le Théâtre National Populaire.
Marie-Hélène Dasté ( 1902-1994), décoratrice, comédienne, et fille de Jacques Copeau remet , en 1963, au Département des Arts du spectacle, les archives concernant la carrière de son père : mises en scène écrites, maquettes originales de décors et costumes, photographies de scène, recueil de presse, dossiers administratifs. Plus un ensemble d’archives sur l’activité du Théâtre du Vieux-Colombier de 1913-1924, ainsi que de la troupe « Les Copiaus » à partir de 1925. Les achats et les dons concernant cette collection se sont depuis succédés : en 1988 le Département acquiert les cahiers et carnets autographes que Copeau a rédigés depuis ses débuts d’auteur, en 1896, jusqu’à sa mort. En 1995 et 1996 quatre nouveaux achats ajoutent à cette collection une vingtaine de manuscrits autographes et 26 cahiers de conduite concernant ses mises en scène au Vieux-Colombier ainsi qu’une abondante correspondance (près de 3000 lettres) adressée par de grands théoriciens et metteurs en scène (Craig, Appia, Hébertot, Barsacq, Barrault…), des auteurs dramatiques(Vildrac, Montherlant…) auxquels s’ajoutent une soixantaine de maquettes (réalisées pour les spectacles qu’il a montés), dessinées par, sa fille M-H Dasté, Fauconnet, Gampert, Duncan Grant, Bertholt Mann
En 1963 une exposition « Jacques Copeau et le Vieux-Colombier » organisée à la Bibliothèque de l’Arsenal, a commémoré le Cinquantième anniversaire de la fondation du Vieux-Colombier.
L’achat de la correspondance Gaston Gallimard et Valentine Tessier, en 1998 a permis d’apporter un complément à cette collection. Il y est question de Jacques Copeau, avec lequel elle débuta au Vieux-Colombier, de Jean Giraudoux, dont elle fut l’interprète. Gaston Gallimard, fondateur de la NRF, lui parle de ses rôles et évoque la vie littéraire, artistique, et théâtrale parisienne. On pourra en complément consulter avec profit, un certain nombre de documents se rapportant à la Compagnie des Quinze, fondée par Michel Saint-Denis (1897-1971), neveu de Copeau, « Copiaus », metteur en scène et continuateur de l’œuvre de son oncle, en France, Angleterre et U.S.A.
Un inventaire des documents se rapportant à l’activité de Jacques Copeau, et des « Copiaus » est à la disposition des chercheurs.
Copeau (Jacques).- Souvenirs du Vieux-Colombier : la compagnie des quinze / Jacques Copeau. [Paris] : Nouvelles éditions latines, 1975. Copeau (Jacques).- L’Ecole du Vieux-Colombier / Jacques Copeau….textes établis, présentés et annotés par Claude Sicard. [Paris] : Gallimard, 1999. Collection : Pratiques du théâtre. Copeau (Jacques).- Journal : 1901-1948 / Jacques Copeau ; texte établi, présenté et annoté par Claude Sicard. Paris : Seghers, 1991. Collection : Pour mémoire. Aliverti (Marie, Inès).- Jacques Copeau…[texte imprimé] /Marie, Inès Aliverti. Roma, Bari : G. Laterza, 1997. (Il teatro del xx secolo) (Biblioteca Laterza ; 471) [Exposition .Paris. Bibliothèque nationale. Bibliothèque de l’Arsenal. 1963.].- Catalogue. Jacques Copeau et le Vieux-Colombier. 1963. 55p. Corvin (Michel).- Dictionnaire encyclopédique du Théâtre….Paris : Bordas, 1995
Craig, Edward Gordon (1872-1966)
Edward Gordon Craig (Savenage, Grande-Bretagne, 1872- Vence, France, 1966) fils de l’actrice Ellen Terry et de l’architecte Edward William Godwin, disciple d’Henry Irving, acteur shakespearien et directeur du Lyceum Theatre de Londres.
D’abord acteur, Craig se tourne vers la mise en scène, tout en multipliant des activités dans des domaines variés : il dessine des décors et des costumes, pratique la gravure sur bois, fonde des revues (The Mask...) une école-laboratoire de théâtre à Florence. En parcourant l’Europe, il poursuit inlassablement son œuvre de réformateur du théâtre et rencontre, dans ce domaine, les grands praticiens de l’époque : Stanislavski, Meyerhold, Taïrov, Appia, Brecht… Ses réalisations, ses projets, ses maquettes et dessins, ses écrits théoriques en font l’un des phares de l’esthétique théâtrale contemporaine.
La Bibliothèque nationale acquiert en 1957, l’essentiel des archives d’ E. Gordon Craig : manuscrits d’ouvrages et notes de mises en scène, une collection remarquable de gravures et de dessins concernant l’architecture théâtrale, 450 maquettes dessinées par lui ; une collection de marionnettes et de poupées pour le théâtre d’ombres (120 marionnettes javanaises de Wayang Kulit, une dizaine de marionnettes birmanes), de masques javanais, africains (20), ses correspondances et sa propre bibliothèque théâtrale, riche de 12 000 ouvrages français anglais, italiens, allemands, sur le théâtre, dont beaucoup annotés de la main de leur propriétaire, portant des ex-libris dessinés par lui ou des dédicaces d’auteurs, truffés parfois de gravures, de lettres manuscrites. Cette collection, enviée par de nombreuses bibliothèques étrangères, constitue à elle seule, par sa valeur et l’originalité de son contenu, un ensemble unique au monde pour les chercheurs. Une exposition a été organisée en 1962, par la Bibliothèque nationale, à l’occasion du 90e anniversaire de l’artiste, les éléments les plus prestigieux de la collection ont été montrés au public.
Cette collection peut être consultée au Département des Arts du spectacle où se trouvent deux catalogues sur fiches de la bibliothèque de Craig : Catalogue auteurs, titres et sous-titres de pièces anonymes, ordre alphabétique (20 000 entrées environ ; catalogue reproduit sur microfiches) ; le Catalogue matières, découpé en grandes sections : Théâtre, Danse, Marionnettes (fonds important), Fêtes, Personnalités, Pays, Généralités (10 900 entrées environ).
Un inventaire est consultable en ligne dans le catalogue BnF Archives et manuscrits : http://archivesetmanuscrits.bnf.fr/ark:/12148/cc42345.
Deleuze, Gilles (1925-1995)
Né à Paris en 1925, il y fait ses études secondaires. Après l’agrégation de philosophie en 1948, il enseigne au lycée, dans plusieurs villes françaises. Après sa thèse et un passage à la Sorbonne, il obtient un poste à l’Université de Lyon, avant de rejoindre, en octobre 1969, l’Université de Paris VIII à Vincennes. Il y enseigne jusqu’au 30 septembre 1987. Lorsqu’il entre à Vincennes, Gilles Deleuze vient d’écrire Différence et répétition, texte qui précise et condense sa critique de la rationalité du discours de savoir et du discours philosophique, en particulier. La capacité qu’il a de penser au moment même où il enseigne et sa remise en cause de toute systématisation, y compris celle des discours révolutionnaire et psychanalytique, attirent beaucoup de monde.
Ses cours deviennent peu à peu un lieu de passage essentiel pour les étudiants de l’Université de Paris-Vincennes. Une génération viendra s’y confronter à la “ métaphysique nomade ” qu’il pratique. Dès la fin des années 1970, Deleuze autorise certains étudiants à enregistrer ses cours sur magnétophone ou, plus rarement, sur magnétoscope. Certains étudiants, comme Marielle Burckhalter ou d’autres, ont pu conserver la trace vocale de cette pédagogie réflexive. Les années 1981-1982, 1982-1983, 1983-1984 et 1984-1985 en particulier, sont consacrées au cinéma. À partir de considérations de Bergson sur la perception, Deleuze entame une analyse de l’ “ image dans le temps ”. Il prend ses exemples parmi l’œuvre de quelques grands réalisateurs en les inscrivant dans le continuum de l’histoire du cinéma, pour les confronter avec des catégories philosophiques qu’il revisite à l’occasion, espace, image, temps... Il propose alors une classification dynamique des moyens du cinéma (le montage, la couleur, le plan...). Son analyse du cinéma s’inscrit dans la volonté de déplacer “ l’espace de la pensée ”. Elle lui permet, par ce détour, de revenir aux textes des philosophes qui l’ont inspiré, Spinoza, Bergson, Nietzsche, mais aussi Kant, Hegel, Platon.
Les autres cours enregistrés font référence soit aux premiers textes de Deleuze, soit à des textes qu’il est en train d’écrire. Il reprend, développe ou critique, Nietzsche et la philosophie de 1962, L’Anti-Œdipe de 1972, Mille plateaux de 1980, le Foucault de 1986, Liebnitz et le baroque de 1988. Ces cours réalisent ainsi le projet d’une philosophie intempestive, au sens de Nietzsche, c’est-à-dire qui choisit librement son objet, là où le désir et la curiosité les poussent, au besoin hors du champ étroit des préoccupations philosophiques traditionnelles. Par la volonté de Gilles Deleuze, de sa famille, de l’Université de Paris-VIII (transférée à Saint-Denis en 1980), par celle des différents étudiants qui ont réalisés ses enregistrements, les cours du 6 novembre 1979 jusqu’au 25 mai 1987, soit huit années universitaires, sont venus rejoindre les collections de documents sonores du département de l’Audiovisuel de la BnF.