Jean-Baptiste Bourguignon d’Anville est né à Paris en 1697. Dès son jeune âge, il manifesta un goût particulier pour la géographie, employant son temps à dessiner des cartes d’après les descriptions données par les auteurs anciens. Sorti du collège, il fut admis dans la société de l'abbé de Longuerue, dont les conseils augmentèrent à la fois ses aptitudes et sa curiosité, au moins en matière géographique, car il s’intéressait presque uniquement aux positions des peuples et des villes, cherchant à évaluer les mesures anciennes pour fixer les divers emplacements. Il n’avait que 22 ans et n'avait encore rien fait paraître quand il reçut le brevet de géographe du roi, titre qu’il justifia bientôt en publiant les cartes du royaume d’Aragon et celles qu’il avait établies pour la description de la France par Longuerue. En 1727, il fit paraître ses cartes de l’Afrique, puis celles destinées à l’Histoire de Saint-Domingue du P. Charlevoix et à l’Oriens christianus du P. Le Quien. Il entra alors en relations avec les jésuites, qui le choisirent pour rédiger les cartes de la Chine levées par leurs missionnaires et destinées à former l’atlas qui accompagne l’histoire du P. Du Halde. Il étudia ensuite la figure de la terre, question qui préoccupait les savants et écrivit deux mémoires sur la mesure du globe, mais ses conjectures se révélèrent erronées. En 1743, il donna sa carte d’Italie et expliqua dans l’Analyse géographique de l'Italie (1744) la manière dont elle avait été composée ; il y réduisait de plusieurs lieues carrées l’étendue attribuée au pays, et quand Benoît XIV eut fait procéder à des mesures de triangulation, d’Anville constata que ces mesures confirmaient ce qu’il avait lui-même découvert. Toutes ses cartes étaient très appréciées, tant par les géographes que par les navigateurs. Bougainville, en traversant les Moluques, dit que la carte qui lui donna le plus de lumières fut celle de d’Anville, dont l’exactitude était remarquable pour un cartographe de cabinet. Il avait été reçu en 1754 membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres mais ne fut élu qu’en 1773 par l’Académie des sciences, à la seule place dévolue à la géographie. Dans le même temps, il avait été nommé premier géographe du roi. Jean-Baptiste d’Anville est l'auteur de 211 cartes ou plans et de 78 ouvrages ou mémoires imprimés : méthodologie des levés pour la construction de cartes de détail ; travaux de géographie “ historique ” et sur les mesures anciennes ; géographie des grands empires anciens et contemporains (Egypte, Empire romain, Inde, Russie, Empire Ottoman). Il est également l’auteur de nombreux articles insérés dans le Recueil de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, toujours accompagnés de cartes. En dehors des cartes dont il était l’auteur, d’Anville avait constitué une abondante collection de documents cartographiques, tant gravés que manuscrits, la plus complète et la plus précieuse, selon B.-J. Dacier, qui ait peut-être jamais existé. De son vivant, elle avait été enrichie de multiples donations faites par des savants, des collectionneurs et des voyageurs de tout pays. Il avait songé dès 1772 à céder cette collection au roi, mais ce n’est qu’en 1779 que l’affaire fut réglée. Lorsque survint la mort de d’Anville, plus riche d’honneurs que d’argent, la collection passa du Louvre où il logeait, à Versailles, où Jean-Denis Barbié du Bocage poursuivit l’inventaire qui faisait tant défaut depuis que la collection appartenait au roi et qu’il acheva en 1828. Elle passa ensuite au ministère des Affaires étrangères avant de venir, en 1924, enrichir les collections du département des cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France. Le récolement entrepris alors par Charles Du Bus permit de constater la perte ou le vol de certaines cartes manuscrites survenus pendant le séjour de la collection chez les diplomates, de sorte qu’elle renfermerait aujourd’hui près de 10500 cartes de toute région et de toute époque depuis les premières éditions de la Géographie de Ptolémée jusqu'aux années 1770-1780.
Dictionnaire de biographie française. T. 3, 1939 Du Bus, Charles. "Les collections d’Anville à la Bibliothèque nationale". Bulletin de la Société de géographie, 1926, t. XLI, p. 93-145
Les Catalogues imprimés de la Bibliothèque nationale : liste, description, contenu, Paris : Bibliothèque nationale, 1943, Ge 7
Le romancier et journaliste Henri Barbusse (1873-1935), célèbre avant tout pour son roman Le Feu, qui obtint le prix Goncourt en 1916, avait épousé en 1898 Hélyonne Mendès (1879-1955), fille du poète Catulle Mendès et de la musicienne et compositrice Augusta Holmès. Madame Barbusse légua à la Bibliothèque nationale les manuscrits des deux romans de guerre, Le Feu et Clarté, ainsi que les livres et papiers de l’écrivain. (Voir au département des Manuscrits Fonds Hélyonne Barbusse, NAF 16258-16263, 16603). Les ouvrages imprimés (Don 66-4793 et 67-363), au nombre de 409, furent dispersés entre la Réserve des livres rares et les Imprimés. On y trouve notamment des livres de prix d’Henri Barbusse au collège Rollin, ses oeuvres imprimées sur grand papier,et des textes d’auteurs contemporains illustrant ses relations familiales ou amicales et ses engagements pacifiste et politique. Le département de la Musique conserve un recueil de coupures de presse d’Augusta Holmès (Musique B 4° 391).
Bibliothèque nationale. Henri Barbusse. Exposition organisée à l’occasion de la donation des manuscrits du « Feu » et de « Clarté ». Catalogue établi par Madame Dubief, 1966.
André Antoine (1858-1943), considéré comme le créateur de la fonction de metteur en scène au sens moderne du terme, fonde le Théâtre-Libre en1887 pour défendre au théâtre l’école naturaliste. A contre courant des conventions en cours, il se fait le propagateur d’un jeu naturel, inscrit dans un décor exact, des accessoires vrais, des costumes inspirés du réel. L’éclairage électrique joue un rôle déterminant dans son système esthétique. La mise en scène chez Antoine procède d’une véritable reconstruction artistique du réel, comme chez Stanislavski.
Il monte durant les neuf fécondes années d’exercice de ce théâtre, 124 œuvres nouvelles, introduit et fait connaître en France de grands auteurs étrangers, Ibsen, Strindberg. Devenu directeur du Théâtre Antoine (1897-mai 1906), après la fin de l’expérience du Théâtre-Libre, il prolonge sa démarche, met en scène Shakespeare, et poursuit au Théâtre de l’Odéon (1906-1914) son incursion chez les auteurs étrangers mais aussi dans le répertoire classique français (Racine, Molière…). Ses mises en scène combinent un souci de fidélité historique et une extrême théâtralité. Il aborde le cinéma avec les mêmes règles qu’il a appliquées au théâtre. Il est le premier à tourner en extérieur, et tente dans un style original de mêler documentaire et fiction, ethnographie et poésie (Le Coupable, L’Hirondelle et la Mésange) Après la première guerre mondiale, son activité sera essentiellement celle d’un critique dramatique et cinématographique (dans Le Journal, L’Information…).
André Antoine a lui-même remis en 1932 à son ami Auguste Rondel un fonds qui sera complété par des dons successifs et qui comprend des manuscrits reçus, très souvent enrichis de notes de mise en scène, un ensemble de registres et de documents administratifs, la précieuse série des huit recueils dits "recueils Mosnier", qui relatent l’histoire du Théâtre-Libre, les critiques dramatiques qu’Antoine signait et sa correspondance, soit 20 000 lettres d’acteurs décorateurs, écrivains, cinéastes, hommes politiques. Des achats notamment de correspondance ont permis de compléter cet ensemble. En 1966 et 1967, cette collection s’enrichit : du manuscrit autographe de l’ouvrage écrit sur Antoine par Mattei Roussou, auteur dramatique, mais surtout médecin d’Antoine, des lettres de ce dernier à la famille, ainsi que des maquettes de décors de Medgiès et Wadachi ; grâce à la générosité de son fils, le comédien Samson Fainsilber.
André-Paul Antoine (1892-1982), son fils, lui même auteur et scénariste, complète la collection par un don effectué en 1955, et y ajoute sa propre correspondance. Il fait aussi un legs remis en 1984, d’un ensemble d’ouvrages -certains dédicacés à Antoine, d’autres annotés de sa main- de manuscrits, de maquettes et de photographies. Le fonds André Antoine est à l’origine des dons émanant des grands praticiens du 20e siècle, qui sont venus enrichir les collections de spectacle, une initiative largement redevable à l’amitié nouée entre Auguste Rondel et André Antoine. Une liste des correspondants d’Antoine est à la disposition des chercheurs.