André Antoine (1858-1943), considéré comme le créateur de la fonction de metteur en scène au sens moderne du terme, fonde le Théâtre-Libre en1887 pour défendre au théâtre l’école naturaliste. A contre courant des conventions en cours, il se fait le propagateur d’un jeu naturel, inscrit dans un décor exact, des accessoires vrais, des costumes inspirés du réel. L’éclairage électrique joue un rôle déterminant dans son système esthétique. La mise en scène chez Antoine procède d’une véritable reconstruction artistique du réel, comme chez Stanislavski.
Il monte durant les neuf fécondes années d’exercice de ce théâtre, 124 œuvres nouvelles, introduit et fait connaître en France de grands auteurs étrangers, Ibsen, Strindberg. Devenu directeur du Théâtre Antoine (1897-mai 1906), après la fin de l’expérience du Théâtre-Libre, il prolonge sa démarche, met en scène Shakespeare, et poursuit au Théâtre de l’Odéon (1906-1914) son incursion chez les auteurs étrangers mais aussi dans le répertoire classique français (Racine, Molière…). Ses mises en scène combinent un souci de fidélité historique et une extrême théâtralité. Il aborde le cinéma avec les mêmes règles qu’il a appliquées au théâtre. Il est le premier à tourner en extérieur, et tente dans un style original de mêler documentaire et fiction, ethnographie et poésie (Le Coupable, L’Hirondelle et la Mésange) Après la première guerre mondiale, son activité sera essentiellement celle d’un critique dramatique et cinématographique (dans Le Journal, L’Information…).
André Antoine a lui-même remis en 1932 à son ami Auguste Rondel un fonds qui sera complété par des dons successifs et qui comprend des manuscrits reçus, très souvent enrichis de notes de mise en scène, un ensemble de registres et de documents administratifs, la précieuse série des huit recueils dits "recueils Mosnier", qui relatent l’histoire du Théâtre-Libre, les critiques dramatiques qu’Antoine signait et sa correspondance, soit 20 000 lettres d’acteurs décorateurs, écrivains, cinéastes, hommes politiques. Des achats notamment de correspondance ont permis de compléter cet ensemble. En 1966 et 1967, cette collection s’enrichit : du manuscrit autographe de l’ouvrage écrit sur Antoine par Mattei Roussou, auteur dramatique, mais surtout médecin d’Antoine, des lettres de ce dernier à la famille, ainsi que des maquettes de décors de Medgiès et Wadachi ; grâce à la générosité de son fils, le comédien Samson Fainsilber.
André-Paul Antoine (1892-1982), son fils, lui même auteur et scénariste, complète la collection par un don effectué en 1955, et y ajoute sa propre correspondance. Il fait aussi un legs remis en 1984, d’un ensemble d’ouvrages -certains dédicacés à Antoine, d’autres annotés de sa main- de manuscrits, de maquettes et de photographies. Le fonds André Antoine est à l’origine des dons émanant des grands praticiens du 20e siècle, qui sont venus enrichir les collections de spectacle, une initiative largement redevable à l’amitié nouée entre Auguste Rondel et André Antoine. Une liste des correspondants d’Antoine est à la disposition des chercheurs.
2178 cartes dont 80 cartes manuscrites de d’Anville, 300 cartes autographes de Barbié le père, intégrées au fonds général
Baluze (Étienne) Né à Tulle en décembre 1630, mort à Paris le 28 juillet 1718, Étienne Baluze fait ses études à Toulouse, et y devient le secrétaire de l’archevêque Pierre de Montchal, puis de son successeur, le théologien gallican Pierre de Marca, qui le fait venir à Paris en 1656. Baluze est l’un des plus grands érudits français de son temps : éditeur d’auteurs anciens et de recueils conciliaires, il s’intéresse aussi à l’histoire de sa ville natale et aux poètes de sa région, découvre des textes rares, et publie les œuvres de son protecteur et ami Pierre de Marca, qui lui a légué ses papiers. C’est sans doute de lui qu’il tient ses premiers manuscrits. Engagé comme bibliothécaire par Colbert en 1667, Baluze est chargé de la bibliothèque Colbertine jusqu’en 1700. Il ne néglige pas pour autant sa propre collection, profitant même parfois de sa situation privilégiée auprès du ministre, et détournant à son profit des documents de première importance qui auraient dû entrer dans la Colbertine. Plus intéressé par les textes que par les documents à caractère bibliophilique, il montre un goût marqué pour les manuscrits les plus anciens. Sa bibliothèque, avec 11000 imprimés, plus de 900 manuscrits, environ 700 chartes, et ses dossiers de travail, est considérable pour un particulier. En 1705 Baluze refuse la proposition d’achat de ses manuscrits par le duc de Bouillon, mais il se laisse convaincre par le cardinal, frère du duc, et décide de lui céder par testament ses chartes et ses papiers, contre une compensation de 10.000 livres pour ses héritiers. Mais le cardinal de Bouillon meurt en 1715 et Baluze envisage alors de remettre ses papiers aux Bénédictins de Saint-Maur, qui en connaissent l’intérêt, ou de les vendre à la Bibliothèque royale. Quand il meurt en 1718 c’est finalement un testament rédigé en mai 1716 qui désigne le destinataire de la bibliothèque, Geneviève-Madeleine Muguet, veuve du banquier François Le Maire et fille de François Muguet, imprimeur du roi mort en 1702 et éditeur préféré de Baluze. La mise en vente est immédiate et les imprimés sont vendus au détail comme le souhaitait Baluze mais une clause du testament permettant l’achat en bloc des manuscrits, Madame Le Maire accepte les 30.000 livres proposées par la Bibliothèque royale en échange des collections manuscrites et celles-ci sont livrées à l’abbé Bignon le 17 septembre 1719. Des deux lots différents composant ces collections le premier correspond aux 965 manuscrits anciens, dont certains proviennent de Jean-Baptiste Hautin, Julien Brodeau et Ranchin, ou de Tulle, ville natale de Baluze, et de l’Orléanais, où il dut s’exiler entre 1710 et 1713. Ils ont été classés pour leur très grande majorité dans le fonds latin ou ont trouvé place dans les fonds français, grec, italien, espagnol et portugais ; un volume figure dans le fonds arabe, un autre dans le fonds slave. Le second lot, regroupant papiers et chartes, constitue le fonds Baluze (voir à ce nom).
Bibliotheca Baluziana, seu catalogus librorum bibliothecae V. Cl. D. Steph. Baluzii Tutelensis, Paris, 1719, 3 vol., les deux premiers consacrés aux livres imprimés, le troisième aux manuscrits anciens, aux chartes et aux papiers de Baluze Delisle (Léopold), Le Cabinet des Manuscrits de la Bibliothèque impériale, I, Paris, 1868, p. 364-367 E. Fage, Étienne Baluze, sa vie, ses ouvrages, son exil, sa défense, Tulle, 1899. P.-M. Bondois, « Concordance des numéros des manuscrits du fonds Baluze … avec les numéros actuels des fonds latin, français et de langues modernes », dans Bibliothèque de l’École des Chartes, CIII (1942), p. 339-347.
Léopold Delisle, Le Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque impériale [nationale] : étude sur la formation de ce dépôt, comprenant les éléments d’une histoire de la calligraphie, de la miniature, de la reliure et du commerce des livres à Paris avant l’invention de l’imprimerie, 1868-1881, t. I, p. 364-376
Baluze (Fonds) Acheté en 1719 avec l’ensemble des manuscrits ayant appartenu à Étienne Baluze, le fonds Baluze regroupe des documents très variés, qui sont arrivés en liasses ou en portefeuilles à la Bibliothèque royale. Le classement de cet ensemble a été remanié à plusieurs reprises: le premier rangement en sept armoires est dû à Baluze lui-même, mais sitôt le récolement réalisé en 1720, le garde des manuscrits Jean Boivin entreprend en 1721-1722 de reclasser les papiers dans un ordre totalement différent, les versant dans dix-neuf sections. Un catalogue manuscrit sommaire garde la trace de ce classement compliqué et peu pratique ; seule la correspondance, qui ne figure pas dans la Bibliotheca Baluziana, y fait l’objet d’un dépouillement assez détaillé (nouv. acq. fr. 5621-5622). Et aussitôt après la mort de Boivin en 1726, l’abbé de Targny rétablit autant que faire se peut l’ordre ancien des armoires, tout ce qui n’est pas identifié dans une armoire étant classé sous la rubriques « Armoires incertaines » ; l’inventaire manuscrit établi en 1727-1738 rend compte de ce travail de mise en ordre (nouv. acq. fr. 5623). D’autres tentatives de catalogage aboutiront en 1921 avec la publication du Catalogue de la Collection Baluze, qui reprend le classement de 1726 à l’exception de quelques volumes ou pièces, intégrés dans d’autres fonds du département. Les documents restés longtemps non reliés et non estampillés font l’objet de toutes sortes de convoitises depuis le XVIIe siècle jusqu’aux célèbres affaires de vols du XIXe siècle. C’est pourquoi on procède en 1843-1844 à un nouveau récolement, puis au partage des pièces en 379 volumes, qui sont tous reliés au chiffre de Louis-Philippe. Les chartes, inventoriées et numérotées par Léopold Delisle, forment une série de 19 volumes placés à la fin de la série (numéros 380-398). Outre les papiers personnels de Baluze, environ 80 volumes dont la moitié de sa main, le fonds Baluze contient plusieurs ensembles provenant de savants comme Pierre de Marca, André Duchesne, les frères Chifflet et Masson, Jacques Sirmond… On y trouve aussi les archives de l’administration de la Bibliothèque Colbertine par Baluze, des documents provenant de Richelieu, Mazarin et Colbert, et en particulier leur correspondance. La série des chartes contient de nombreuses bulles pontificales, des actes conciliaires, des diplômes carolingiens et des actes royaux, ainsi qu’un des inventaires de la librairie de Charles V au Louvre.
Bibliotheca Baluziana, seu catalogus librorum bibliothecae V. Cl. D. Steph. Baluzii Tutelensis, Paris, 1719, 3 vol., les deux premiers consacrés aux livres imprimés, le troisième aux manuscrits anciens, aux chartes et aux papiers de Baluze Delisle (Léopold), Le Cabinet des Manuscrits de la Bibliothèque impériale, I, Paris, 1868, p. 364-367 E. Fage, Étienne Baluze, sa vie, ses ouvrages, son exil, sa défense, Tulle, 1899. Auvray (Lucien) et Poupardin (René), Catalogue des manuscrits de la collection Baluze, Paris, 1921.
Lydia Mérigot et Pierre Gasnault, Les Catalogues du Département des manuscrits : manuscrits occidentaux, Paris : Bibliothèque nationale, 1974, p. 55. - Les Catalogues imprimés de la Bibliothèque nationale : liste, description, contenu, Paris : Bibliothèque nationale, 1943, Mss 123-124. - Werner Paravicini, Die Nationalbibliothek in Paris : ein Führer zu den Beständen aus dem Mittelalter und der frühen Neuzeit, München ; New York ; Paris [etc.] : K.G. Saur, 1981, p. 51